Oeuvres : Un bonheur impossible. Tome premier

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Quelque temps après la venue au monde S de ses deux entants, Raoul perdit sa mère. C'était la meilleure partie de son cœur, la r moitié de sa vie qui s'en allait en terre. La douleur du jeune homme fut pro-] fonde, comme devait l'être celle d'un pareil fils. Il pleura longtemps la sainte et digne femme qui s'était éteinte en la bé-r nissant, en implorant Dieu pour son bonheur. Il la pleura longtemps et net trouva des consolations que dans le souvenir de son amour et de ses bontés pour j lui. Ce malheur étaitle prélude de bien plus grands encore. Ce jour-là, Pauline était partie de bonne heure pour la ville. Elle était accom-j pagnée de Jean, le garçon de ferme, Raoul ; n'ayant pu le faire par suite de travaux importants qu'il avait à diriger lui-même. j Tout le long de la route, la jeune femme fut silencieuse, malgré les efforts de Jean pour l'égayer. Elle, qui s'enflammait | à tout propos, était ce jour-là, d'une mé- I lancolie sombre, nerveuse, désolée, si ! nous pouvons nous exprimer ainsi ; et ce qui, d'ordinaire, appelait sur ses lèvres, j des prières ardentes au ciel, des cris d'ad- ■ miration passionnée, n'avait en elle aucucune émotion ni ne remuait son cœur. | Dans le baiser qu'elle donna à Raoul avant de se mettre en route, il y avait des S larmes et des sanglots. Le jeune homme s'en aperçut : — Qu'as tu, lui demanda-t-il ? tu sombles triste ce matin, Pauline, tu souffres ? — Je n'ai rien, mon ami, lui réponditelle ; en essayant de sourire. Je ne souffre ! pas, mais je suis triste de te quitter. Etait-ce pressentiment, avertissement,1


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