Aux Antilles : hommes et choses

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AUX ANTILLES

grandes roches polies semblent parsemées d'étincelles. Et, dans son inépuisable abondance, la longue gerbe ruisselle toujours, s'écrasant sur des blocs de granit avec un gémissement sourd au milieu d'un brouillard lumineux et nacré. En ce paysage solitaire au milieu de cette végétation souveraine, de quel effroi, de quelle admiration les premiers hommes ne devaient-ils pas se sentir pénétrés à la vue d'une source ou d'une chute d'eau ! Sans doute, au temps des Caraïbes, celle-ci portait un nom spécial, honorée comme un esprit, adorée comme une déesse. Ce volcan dont elle descend paraissait lui-même un dieu, car dans ces pays tropicaux, parmi cette nature tranquille, ces éléments mouvants: l'eau, le feu, devaient sembler à ces esprits primitifs d'une autre essence et participer d'une autre vie. Et tandis qu'avec peine je remonte le sentier escarpé et sinueux, insensiblement, cette pensée me ramène au passé plus lointain encore. Une seconde fois, comme à Dominique, j'évoque les âges préhistoriques. — Et voici que m'oppresse à nouveau le même mystère, celui de la formation de ces îles si complètement lié à celui de leur disparition.


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