Les corsaires du Roi

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UN GENTILHOMME DE LA FLIBUSTE

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basin amarante : c'est lui qui me l'a dit. Devant Alger, où il faillit sauter en l'air avec sa galiote à bombes, il portait un habit à la turque semé de pierreries du haut en bas, et des grelots d'argent à ses jarretières. Dans l'affaire de Selingue contre les Hollandais, il apparut sur la dunette de la Trompeuse sanglé dans un justaucorps à brevet, bien qu'il n'eût pas le droit de le porter : encore l'avait-il fait broder d'abeilles et de bouquets en hommage à je ne sais quelle dame qui s'appelait Rose ou Marguerite. Notez, messieurs, que pendant ce même temps le Roi faisait publier mainte ordonnance prescrivant l'habit uniforme aux officiers de son armée. Cela ne se fit pas sans force criailleries de la part des intéressés. Ils voulaient bien donner à leur maître leur sang, leurs membres et leurs richesses, mais demeuraient intraitables sur le chapitre de la perruque ou des manchettes. A cette époque, la noblesse avait encore de la hauteur. Servir le Roi signifiait tout au plus se faire tuer pour lui. Ils y consentaient de grand cœur, puisqu'ils étaient nés pour cela, mais ils ne voulaient pour rien au monde se laisser asservir à des minuties. Le choix d'un parement ou d'un galon faisait en quelque sorte partie de leurs privilèges. Ils détestaient les teintes neutres, de castor ou de


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