Les corsaires du Roi

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LA MESSE SUR LE GAILLARD

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On en vint ainsi à l'Exaudiat où se fit une cinquième décharge, puis une sixième pendant la prière pour le Roi, qui fut suivie du grand cri de tout l'équipage : — Vive le Roi ! Après quoi, l'on jeta le cadavre à la mer et l'on but le coup de l'étrier. Ces messieurs s'embarquèrent dans la chaloupe avec leurs riches vêtements et l'argent de leurs marchandises, et je pus voir de loin qu'ils étaient accueillis par mille caresses, tant pour eux-mêmes que pour ce qu'ils rapportaient. J'étais resté avec le capitaine et sa femme, qui me voulaient faite goûter un vin des Canaries dont ils avaient deux ou trois fanegas, mesure de Cadix. Il était au-dessus de leurs éloges, et si le Roi ne s'est pas bien porté ce jour-là, ce n'est pas faute que nous n'ayons bu à sa prospérité. Le capitaine Mathieu ne voulut pas non plus que je m'en allasse sans être payé de mes peines. Il fit porter dans le canot qui devait me ramener à terre les ornements dont je m'étais servi, un ostensoir en or tout garni de diamants, une cloche du poids de cent cinquante-trois livres six onces de cuivre, enlevée à une église des luthériens, trois caisses de chandelles et un tonneau de cidre. Et comme je lui avais dit, par hasard, que je n'avais pas de nègre domestique, il m'en fit donner deux pour cultiver mon jardin


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