Les corsaires du Roi

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LE TRÉSOR DE BOQUISECO

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Le Nantais se contenta de hausser les épaules. Il fut alors mis à la torture qu'on nomme la velada parce que le patient doit la subir pendant douze heures, s'il peut aller jusque-là. On l'éleva par les jambes et par les pieds, la figure en l'air, entre les deux mâts, et on le laissa redescendre lentement jusqu'à ce que tout le poids de son corps reposât sur une cheville verticale appuyée contre l'os sacrum. C'est le plus terrible des supplices et il est bien rare qu'on le supporte jusqu'au bout. Après huit heures de résistance, vaincu par la douleur, il déclara que les piastres étaient cachées dans l'île de Mariguana et qu'il en indiquerait lui-même l'endroit. Il fut aussitôt remis sur pied, réconforté, avec force aspersion d'eau de la reine de Hongrie et force rasades pour l'intérieur. Après avoir amariné le Boquiseco qui reprit la route de Vera-Cruz, on mit le cap sur l'île dont on n'était pas éloigné de cinquante lieues. C'est dans ce voyage que le Nantais, sans doute par jactance, raconta son histoire, telle à peu près que je vous l'ai fait, car c'est le supercargue qui me l'a répétée, comme je vous l'ai dit tout à l'heure. Il faut ajouter, à la louange des Espagnols, qu'il fut entouré de toutes sortes d'égards, parce que tout de même ces gens-là savent apprécier la bravoure, même de leurs ennemis. Mais voyez leur inconséquence : bien qu'il prît ses repas à la CORSAIRES

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