Les corsaires du Roi

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LA MORT EN DENTELLES

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notre corvette eut coulé bas, que nous fûmes jetés sur les brisants et notre radeau mis en pièces. Deux compagnons qui ne savaient pas nager périrent presque aussitôt. Les autres, je veux dire Nicolas Pelsart, le Portugais et moi, gagnèrent à la nage la côte qui se trouvait à un demimille environ. En approchant de la rive, nous fûmes enveloppés par les vagues et précipités contre les récifs. Je ne sais trop comment nous nous en tirâmes sans avoir les membres fracassés. Pour moi, je restai quelque temps étendu sur une roche plate où je m'étais traîné, et je ne me relevai que pour me mettre à genoux et remercier Dieu de m'avoir sauvé la vie. Presque au même instant, j'entendis la voix de Pelsart et celle du Portugais. Ils me rejoignirent bientôt. Pelsart avait les mains ensanglantées et une large estafilade sous la tempe droite. Le Portugais était sorti indemne de l'affaire. Nous nous embrassâmes longuement en nous félicitant de notre fortune. Nous étions tous les trois complètement nus. Lorsque le Cinque-Ports avait coulé, les nageurs s'étaient dépouillés de leurs vêtements, comme c'est la coutume. Pendant les deux journées que nous avions passées sur le radeau, le soleil qui donnait verticalement sur nos têtes nous avait brûlé si violemment les épaules, la poitrine et CORSAIRES

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