Coeurs martiniquais

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CŒURS MARTINIQUAIS

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la tira de sa contemplation. C'était le moment de la Communion. Quand elle fut à la Table Sainte, elle vit avec émotion que tous les siens l'avaient suivie. Roland très grave semblait à cette heure, aussi loin qu'elle de la terre... Puis ce fut le défilé devant la Crèche, un peu petite, mais si naïve et si touchante, où reposait l'Enfant Divin. Comme autrefois les pieux bergers, chacun lui fit une offrande et après une dernière adoration, on s'en revint à la maison. Chez les Fougeras, Ti-Clé veillait en récitant son chapelet près du berceau de Petit-Paul, et ce fut elle qui alla ouvrir à ceux qu'elle attendait. Nana et Cécée firent aussitôt chauffer le café, le bon café du pays, sans lequel toute fête à la Martinique est incomplète. Ce fut Ginette qui le servit, aidée de Roland, lui portant le sucrier. Du salon bien éclairé, Monsieur Fougeras les suivait des yeux : Elle, si fine, et si jolie dans sa robe de voile blanc, attentive à faire tenir les fragiles tasses de porcelaine ; lui, la contemplant, ravi, bien pris dans son costume de laine grise, oubliant de lui passer le sucre qu'elle réclamait parfois en souriant. De nouveau, un gros soupir souleva la poitrine du père de Roland : " Mon pauvre enfant, murmura-t-il, je ne crois pas qu'elle pense à lui ».


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