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COEURS MARTINIQUAIS
— Tonton Rodolphe, mon premier ouvrage. Je l'ai préparé pour Papa; l'année prochaine ce sera pour toi. — Oui, ma chérie, fit l'oncle. Tu as eu raison, Papa doit être toujours servi le premier. — Viens voir l'ouvrage d'Anne-Marie. C'est ce gentil mouchoir entouré de dentelle. Comme il est joli ! — Comme tout ce que fait ta grande amie, petite Ginette. Allons la complimenter. Ils rejoignirent le groupe formé par les Fougeras, Paul et Lucy Daubray. Le père d'Anne-Marie paraissait tout radieux. A côté de lui, sa sœur Emma, tante Mama, comme l'appelaient les enfants, et ses deux fils, Roland et Xavier, garçonnets de douze et quatorze ans, en vacances eux aussi, depuis la veille. — Enfin maintenant, j'aurai ma fille pour toujours, dit Monsieur Fougeras qui avait passé sous le sien le bras d'Anne-Marie. — Pour toujours !... Jusqu'à ce que le Prince Charmant vous l'enlève, répliqua Lucy en riant. — Le Prince Charmant!... Il aura bien le temps de venir. Pensez donc, Anne-Marie n'a que seize ans. Et puis, je ne me laisserai pas prendre ma fille facilement. — Et vous aurez raison, monsieur Fougeras, car Anne-Marie est un trésor, lit entendre Mlle Hameau qui arrivait au même instant. Je n'ai jamais assez vanté son mérite, et aujourd'hui je tiens à le proclamer en vous assurant du vif regret que j'éprouve à voir celle enfant nous quitter. — Et moi, je dois vous remercier des soins que vous lui avez prodigués. Ne soyez pas trop chagrine de son départ, Mademoiselle. Le Fort n'est pas bien loin et votre élève pourra souvent vous visiter, n'est-ce pas fillette?... Mais... j'y pense... il est temps que tu ailles faire tes adieux car la voiture nous attend.