Coeurs martiniquais

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CŒURS MARTINIQUAIS

Ces derniers mots éveillèrent en Roland un souvenir et, avec un éclair de son ancienne malice : — Oui, Marie-Louise a surtout votre air, c'est ce qui nous donne à penser, n'est-ce pas, que Longelieu pourra l'épouser dans trois ans ? Cette réflexion, qu'elle,avait jadis faite pour se débarrasser du pauvre garçon, la fit s'arrêter interdite et, après une seconde de confusion : — C'est Gaston qui vous l'aura dit? s'écria-t-elle toute rougissante, — Non, ce n'est que mon petit doigt. —Aidé de mon frère, bien sûr. Fi ! le vilain indiscret ! Et comme une petite larme, arrachée à sa confiance trahie, lui embuait délicatement les yeux, il l'attira tendrement à lui et lui effleura doucement la joue : — Ne lui en voulez pas ma Liliane. Il a travaillé lui aussi, sans le savoir, à notre bonheur et nous vaudra ainsi plus tard les plus douces joies de notre vie. Mais, vous ne m'avez pas encore raconté ce que Pierre vous disait, l'autre jour, quand j'ai dérangé ses confidences ? — Il me demandait les motifs de mon refus, désireux de se corriger de ses défauts, pour ne pas encourir d'autres mécomptes. — Ah ! et peut-on savoir ce qui lui fut répondu ? — Mais rien, puisque toutes mes raisons étaient indépendantes de sa personne, et que vous êtes arrivé, juste à temps, pour me tirer d'embarras, Roland. — Et, à moi, les direz-vous, ces motifs si difficiles à exprimer ? — Vous les connaissez déjà. — Je crois les avoir devinés, mais aimerais les entendre de vos lèvres. — Non, pas maintenant, plus tard, peut-être, dit-elle, reprenant sa douce gaîté. — Eh bien ! moi, Liliane, je serai plus généreux, et,


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