Coeurs martiniquais

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CŒURS MARTINIQUAIS

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— Depuis hier, je pense beaucoup à celle qui fut notre commune amie,et ne craignez pas, Roland, que je puisse jalouser jamais l'autel que vous lui avez dressé en votre cœur. Elle le méritait si bien, elle qui fut aussi ma sœur d'élection, ma chère et très douce conseillère. Gomme presque tous les prédestinés, elle avait reçu de Dieu, le don de se faire aimer, et, mieux que tout autre, elle exerçait ce charme souverain sur tous les siens. N'est-ce pas à son heureuse influence que je suis redevable, moi-même, d'être une petite Liliane passable, capable d'attirer votre attention? — Et de la retenir aussi, interrompit-il, vivement ému. Liliane, vous méritez toute ma tendresse et êtes tout pour moi, croyez-le bien : le passé que vous me rappelez, le présent qui fleurit pour vous fêter, et l'avenir que je voudrais exempt de toute ombre à vos yeux. — Et, quand même il y aurait des ombres, nous les effacerions à deux, Roland. Il sourit, ému de sa confiance, et l'en remerciait doucement, lorsqu'un petit pas précipité vint les distraire de leurs pensées : — Ninotte, dit Liliane, elle s'est échappée comme nous de la maison. Roland enleva dans ses bras la petite fille. Mais Raymond accourait déjà à sa poursuite : — Elle s'est sauvée, expliqua-t-il, et Simone la cherche de l'autre côté. Roland embrassa la benjamine : — Ramène-la, alors, Raymond. Puis, regardant s'éloigner les deux enfants : — Savev-vous, Liliane, que Ninotte vous ressemblera ? — Elle a peut-être reçu en partage la vieille indépendance de mon enfance, mais Marie-Louise me rappelle davantage.


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