Coeurs martiniquais

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CŒURS MARTINIQUAIS

— Moulin à vent ! ripostait l'autre. Et les partisans des deux camps se complimentaient à qui mieux mieux quand ils n'en venaient pas aux mains. La Pelée, narquoise, les regardait, envoyant vers le ciel son panache de fumée qui se faisait, chaque jour, un peu plus épais que la veille. Le 1er mai se leva aussi naturellement que de coutume, mais, dans le courant de la journée, des bourdonnements se firent entendre, semblables à des roulements lointains. Ginette croyant à quelque véhicule, courait s'en assurer vainement sur le balcon. Vers cinq heures, la terre trembla. Les pêcheurs racontèrent que les eaux avaient changé d'aspect, qu'elles ne s'abattaient plus sur le rivage de leur mouvement régulier. Ce soir-là, l'abbé Duffau ouvrit le mois de Marie. Dans la pauvre petite église, chacun se pressa un peu plus, bien qu'on n'eût pas encore tout à fait peur. La montagne fumait sa pipe, il n'y avait qu'à la laisser faire. La jeunesse de Saint-Pierre se préparait à y aller en excursion, la Société de Gymnastique lui ayant gaîment donné le branle. Le lendemain, une pluie de cendre obscurcit tout le Prêcheur. Sainte-Philomène n'en fut que légèrement saupoudrée. Trois secousses de tremblement de. terre, précédées de sourds grondements, furent les événements de la journée. Saint-Pierre ne les avait point ressenties. Rodolphe apprit le soir à sa famille que la rivière Blanche seulement un peu grossie, roulait des eaux assez boueuses. — Ces mouvements du sol sont locaux, ajouta le jeune médecin. Notre ville bâtie sur du roc ne craint pas d'accidents de ce genre. Je crois que je vous y ferai rentrer.


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