Voyage à Surinam et dans l'intérieur de la Guiane. Tome troisième

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sa barge que je le vis suspendu dans son hamac , où le retenoit une fièvre brûlante. Ne me reconnoissant pas à cause de mon habit qui ne valoir, pas mieux que celui du matelot le plus déguenillé , il me demanda ce que je voulois; mais quand il reconnut en moi son ancien ami Sledman,si différent de ce qu'il l'avoit vu jadis , il me serra la main et fondit en larmes sans dire un seul mot. Ce mouvement de sensibilité qui augmenta sa maladie, me prouva son amitié pour moi plus que tout discours n'eût pu le faire. Je le pris donc dans mon canot et

l'emmenai dans ma chaumière , où j'eus beaucoup de peines à le faire entrer par un trou qu'on pratiqua tout exprès, car celui du toit ne pouvoit servir de passage qu'à moi seul. Ayant étendu son hamac près du mien , je fis bouillir de l'eau dans laquelle je mis du rhum , du sucre et un peu de biscuit; le malade prit cette soupe , et depuis ce moment, il alla mieux. Il m'apprit qu'un de ses soldats s'e toit noyé dans la traversée ; et que le co!onel Fourgeoud ayant donné aux officiers nouvellement débarqués un bal dont les musiciens étoient un de ses cuisiniers et deux soldats, il y avoit gagné sa


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