Youma : roman martiniquais

Page 36

— 34 — s'il était lancé, à l'aide d'un cadre incliné construit exprès, dans une eau profonde, au creux d'une haute falaise. Lorsque la cargaison était arrivée à bord, et que les rameurs étaient à leur poste, le tambour donnait le signal : on enlevait les cales, on lâchait les cordes, et la longue embarcation filait dans la mer, — toutes ses rames frappant l'eau en même temps, au rythme du tamtam ou du lambour-belai. Tous les dimanches, dans l'après-midi, le Père Kerarnbrun arrivait à cheval du voisin village pour apprendre le catéchisme aux négrillons. Il tenait en général la petite classe dans la sucrerie. Les larges portes à l'avant et à l'arrière du bâtiment s'ouvraient toutes grandes à la brise marine, et le soleil projetait sur le sol l'ombre des cimes des palmiers. Le vieux prêtre savait enseigner les tous petits dans leur propre langue ; il répétait inlassablement chaque question et chaque réponse du catéchisme créole jusqu'à ce que les enfants les sussent par coeur, et fussent capables de les chanter comme un refrain. — Coument ou ka crié fi Bon Dié ? demandait le

Père. (Comment appelez-vous le fils du Bon Dieu ?) Alors toutes les voix enfantines, répétant la question et la réponse, flûtaient en unisson : — Coument nou ka crié fi Bon Die ? Noa kacriè li


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.