Youma : roman martiniquais

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— 27 — que l'écho des sabots de votre cheval, ou le bruissement des cannes à sucre balancées par le vent, — ou encore, à la lisière de quelque abîme de verdure, voilé de fougères arborescentes, Je long appel flûté d'un oiseau inconnu. Mais, tôt ou tard, à un détour du chemin, il surviendra un incident, plus humain, plus vivant, et d'un charme exotique : par exemple une caravane de jeunes négresses nu-pieds et nu-bras, portant sur leurs têtes le produit d'une cacaoyère, qu'elles vont vendre au marché, ou bien un nègre, qui passe en courant malgré sa charge formidable de fruits à pain ou de régîmes-bananes. Vous rencontrerez peut-être une troupe de noirs traînant à la côte un gommier déjà vidé et taillé en forme de canot placé sur un diable, solide et bas, aux essieux grinçants. Les nègres placés à l'arrière du diable le poussent ; ceux qui se trouvent à l'avant le tirent ; et un tambour frappe de son Ka le fond du bateau inachevé, pour rythmer leur chant : — Bom ! li canol ! Allé chaché ! Mené vini ! Bom lli canal /... Ou bien vous apercevrez une bande de bûcherons, qui, sur le bord de la route, scient, pour en faire des planches, le cœur jaune safran ou rouge vermillon d'un arbre à peine abattu et dont vous ignorez le nom, Le tronc encore


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