Youma : roman martiniquais

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— 22 — comme cadeaux de nouvel an. En somme, Youma ne manquait de rien de ce qu'elle pouvait raisonnablement désirer, — sinon de la liberté. Peut-être ne s'était-elle jamais beaucoup inquiétée à ce sujet ? Cependant Mme Peyronnette y avait songé longuement et elle avait pris une décision. Elle refusa deux fois la liberté de Youma à Mlle Aimée malgré les supplications et les pleurs de sa fille. Son refus était motivé par des raisons qu'Aimée était trop jeune encore pour bien comprendre. Mme Peyronnette comptait affranchir Youma dès que la liberté rendrait celle-ci plus heureuse. Pour le moment la servitude était pour la jeune servante une protection morale : Youma demeurait ainsi sous le contrôle de ceux qui l'aimaient le mieux et elle était à l'abri de dangers qu'elle ne soupçonnait pas encore. Et surtout, elle se trouvait dans l'impossibilité de contracter un mariage que sa maîtresse désapprouverait. Mme Peyronnette avait ses projets pour l'avenir de sa filleule ; elle avait l'intention de la marier un jour à un affranchi travailleur et économe, qui lui ferait un foyer agréable : à un charpentier, un ébéniste, un constructeur ou un patron mécanicien. Alors Youma recevrait la liberté, et peut-être une petit dot. Mais en attendant elle était certainement aussi heureuse que possible.


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