Youma : roman martiniquais

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— 142 — que des clameurs, de hideuses menaces, des cris de cannibales en délire... Cependant une bande de noirs promenait à travers les rues, à la lueur des flambeaux, le cadavre de l'ancien meneur, hissé sur un des battants de la porte. Des hommes armés couraient à côté, ils montraient la cervelle rose qui sortait de la blessure, et criaient : — Mi yο k'assassiné nou ! y ο ha ichoué joué nou ! (1) L'exaltation s'accrut encore et devint du délire maniaque. Mais une voix, celle d'une femme, la femme de Sylvain, le meneur, glapit par-dessus tout le bruit. — Mdlé difé-zauil ! brilé louil béké !

(2)

La foule répéta le cri, qui se répercuta comme un tonnerre à travers la rue. — Difé ! mdlé difé ! Mais si par hasard les békés tentaient une descente désespérée sur les incendiaires ? — Olé Vescalié ! (3) suggéra un nègre, et cette idée mit fin à toutes les hésitations. Ils étaient assez nombreux pour arracher tout l'escalier en cinq minutes, et il fallut moins de temps que ça pour que les émeutiers exécutassent l'idée qui leur avait été (1} Voilà qu'on nous assassine et qu'on nous tue nos frères ! (2) Mettez le feu, vous autres ! Brûlez tous es békés ! (3) Coupez l'escalier


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