Youma : roman martiniquais

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temps à autre des bandes de nègres y étaient passées en criant : « A bas les békés », mais depuis la tombée de la nuit tout désordre avait cessé. Les citoyens osèrent même ouvrir leurs fenêtres et jeter un coup d'oeil dehors. Ils entendirent l'appel des conques sans en comprendre le sens, et ils crurent à une nouvelle effervescence du côté du port. Pourtant l'inquiétude s'accentua chez tous, lorsque le bruit de l'eau qui courait dans les ruisseaux en pente, l'eau de la montagne qui purifiait toutes les rues, se fit tout à coup plus violent que de coutume. — L'eau fait toujours beaucoup de bruit dans cette rue, dit M. de Kersaint, elle est tellement escarpée. Mais Youma entra tout à coup seule dans la chambre où les hommes parlaient entre eux. D'un geste elle désigna la fenêtre, et s'écria : — Ce n'est pas l'eau 1 L'ouïe des métis est d'une finesse extraordinaire à distinguer les sons... Tout le monde se tut, et les hommes retinrent leur souffle pour mieux écouter.


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