Youma : roman martiniquais

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La da, aux premiers temps de la colonisation, tenait souvent une place importante dans les riches familles de la Martinique. La da était, en général, une négresse de la teinte la plus foncée, — une caprcsse plutôt qu'une mestive. A son égard, le préjugé de la couleur n'existait pas. La da était esclave, mais jamais l'affranchie la plus belle, la plus cultivée, n'a joui d'une situation privilégiée comparable à celle de certaines das. La da était aimée et respectée comme une mère : elle était à la fois la mère adoptive et la bonne d'enfant. Car l'enfant créole avait deux mères : l'aristocratique maman blanche qui lui donnait le jour — et la sombre mère esclave qui lui donnait tous ses soins, le dorlotait, le baignait, lui apprenait le doux et mélodieux parler des nègres, le promenait dans ses bras afin de lui montrer la belle nature tropicale, lui racontait le soir de merveilleuses histoires populaires, l'endormait aux sons de berceuses, et, en somme, se tenait nuit et jour prête à accomplir son moindre désir. Aussi n'est-il guère surprenant que les das aient été mieux aimées que les mères


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