Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

parmi eux, envoya un messager par canot auprès de Tracy, afin de lui apprendre son arrivée (6). Le 19 février 1665, Clodoré et Chambré, en présence de Tracy, prirent possession de la Martinique, au nom de la Compagnie des Indes Occidentales. Le jour même ils recueillirent, suivant l'usage, le serment de fidélité du Clergé, de la Noblesse, du Conseil Souverain et du Tiers-Etat (7). Après avoir assigné à chacun son poste, le lieutenant-général et l'agent-général partirent le 20 février pour la Guadeloupe (8), où ils avaient à remplir le même cérémonial. Le nouveau lieutenant du roi, Duchesne, consentit à partager à la Martinique ses attributions avec Loubières, qui exerçait seul le commandement dans toute la colonie avant son arrivée. Le premier eut la partie Nord de l'île comprenant SaintPierre, le Prêcheur et la Capesterre; le second reçut la partie Sud, depuis la rivière Latouche, située entre le Carbet et Saint-Pierre, et le Galion à la Capesterre jusqu'à la pointe des Salines, ce qui comprenait le Carbet, la Case-Pilote, la Case des Navires, le Culde-sac Royal, les anses d'Arlets, celles du Diamant, les anses du Laurent et le Cul-de-sac Marin (9). Le texte de l'édit qui créait la Compagnie des Indes Occidentales fut à peine connu des habitants, qu'une sédition éclata au Prêcheur où le commis général Dubuc était venu installer un magasin pour débiter des marchandises. Les habitants l'accusèrent de faire payer 70 livres de petun des objets qui ne coûtaient guère que 25 ou 30 sous en France, et qu'ils pouvaient avoir à bon compte des Hollandais. Ils l'invectivèrent, l'obligèrent à se retirer dans ce quartier, aux cris de : « Point de Compagnie ! Vive le petit Du Parquet ! (10). » Prévenu de l'émeute, Clodoré donna à ses subordonnés les instructions nécessaires pour la contenir, en attendant sa venue dans le quartier troublé. Un capitaine de milices lui ayant demandé où il allait, quels étaient les ennemis qu'il avait à combattre ? il répondit froidement : « Je vais châtier les séditieux et je donnerai du pistolet dans la tête du premier qui ne se mettra pas dans son devoir, et vous, Monsieur, suivez-moi ! » Le lendemain, le gouverneur arriva sur la place d'Armes du Prêcheur. Apprenant que Rodomon, le chef des révoltés, n'avait pas été arrêté par le capitaine de Francillon, parent des Du Parquet, qui s'était contenté de lui donner le conseil de remettre son projet à d'autres temps plus favorables, il s'avança vers ce capitaine et (6) Du TERTRE : t. 3, pp. 155-156. (7) Arch. Nat. Col. CB8-1, Corresp. générale, 1665. (8) Du TERTRE : t. 3, p. 187. (9) Ibid., pp. 171-172. (10) Ibid., p. 187.


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