Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE

POLITIQUE

ET

ÉCONOMIQUE

DE

LA

MARTINIQUE

de sa destitution, se mit en révolte ouverte, expulsant ceux dont il suspectait la fidélité et s'alliant avec les Anglais, possesseurs de la partie orientale de Saint-Christophe. Du Parquet, qui avait accueilli des fugitifs, prit parti pour Thoisy réfugié à la Guadeloupe, où il arriva « avec ses trois cousins et quelques-uns des plus braves de son île ». Il proposa une redescente à Saint-Christophe. Le Conseil, réuni, hésita d'abord. « Néanmoins, comme Du Parquet avait la réputation de vaillant et de brave, s'étant signalé par mille belles actions et qu'il était généralement aymé de tous les habitans, on résolut de suivre son dessein (36). » Descendre nuitamment à la Capesterre, se saisir de Lonvilliers et Tréval, neveux de Poincy, les retenir prisonniers comme otages sur le vaisseau du roi, telle devait être la première tentative de force à opérer. Le 18 janvier on partit, et le soir même on aborda Nièves, petite île anglaise distante d'une lieue à peine de Saint-Christophe. Du Parquet, avec ses compagnons, passe en chaloupe, débarque à la Pointe-de-Sable, se fait reconnaître par un petit groupe de partisans, est acclamé. Il est environ huit heures du soir. Il donne lecture de la commission royale nommant Thoisy gouverneur général de Saint-Christophe, puis de celle que le représentant officiel du roi lui avait donnée. On court ensuite à la maison des neveux de Poincy. Les portes sont enfoncées : Lonvilliers et Tréval, surpris dans leur lit, enlevés, transportés à dos de nègres dans la chaloupe. Puis Du Parquet, à la tête d'environ trois cents hommes ralliés à la cause de Thoisy, s'avance le long du rivage pour surprendre Poincy. Mais celui-ci, averti par ses sentinelles, avait sollicité l'aide du général anglais et deux mille hommes étaient venus renforcer sa troupe. La lutte s'engage : soixante Français sont tués, et Du Parquet est séparé de ses compagnons. Traqué par des éclaireurs, il erre pendant trois jours, se traîne chez les Pères capucins; puis à l'aube, il passe dans la colonie anglaise où l'accueil empressé qu'il reçoit n'est que la marque de la trahison. Le 23 janvier 1646, Jacques Du Parquet et son cousin de Saint-Aubin sont prisonniers du gouverneur rebelle, et Thoisy, pour les libérer, offre vainement l'échange réciproque des détenus (37). Cette mésaventure allait avoir de fâcheuses conséquences pour la Martinique.

(36) Du (37) Du

TERTRE TERTRE

: t. 1, pp. 295 et suiv. : t. 1, pp. 298-303.


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