Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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FONDATION

ET

COLONISATION

DE

LA

MARTINIQUE

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tout entouré d'un bon mur (32). Nous verrons plus tard le mobile qui poussa si vite Du Parquet à édifier ce bâtiment. Sur cette garde qu'il établit auprès de lui, Du Tertre observe « qu'il n'y a point de garnison dans toutes ces isles, mais les habitants sont divisés par compagnie et chacun d'eux fait la garde de temps en temps, au logis du gouverneur, dans les forteresses ou autres lieux destinés à ce sujet par le gouverneur. Les capitaines et officiers de ces compagnies jouissent de plusieurs privilèges, comme d'exemption de droits tant pour leur personne que pour leurs serviteurs et esclaves. Ils ont aussi la préférence quand il arrive des nègres. Tous les habitants les honorent, leur obéissent comme s'ils étaient leurs soldats » (33). En 1642, encouragée par des débuts en somme favorables, la Compagnie des Isles de l'Amérique songea à étendre ses pouvoirs sur les colonies. Elle demanda alors la confirmation de ses concessions et privilèges. Elle obtint l'édit de mars 1642 qui stipulait, entre autres grâces déjà obtenues dans le contrat du 12 février 1635, confirmé le 8 mars suivant, que les vingt années d'exploitation des îles ne pourront commencer qu'à compter de ce jour. Elle fut même autorisée à concéder des terres en fief avec haute, moyenne et basse justice, mais à la condition sine qua non de solliciter de Sa Majesté, pour les habitants qui le désireraient, des lettres et titres de baronnie, comté et marquisat (34). Elle entreprit aussitôt des réformes urgentes dans l'administration des îles. Pour prévenir les abus des uns, les infidélités ou les dilapidations des autres, elle nomma un intendant ayant autorité sur tous les commis et les officiers. Clerselier, sieur de Leumont, conseiller et secrétaire du roi, fut appelé à ces fonctions auxquelles on ajouta celles de juge civil et criminel en l'île de Saint-Chrisophe. Il avait le pouvoir de mander près de lui les fonctionnaires des autres îles, de vérifier leurs comptes et de les révoquer jusqu'à ce que la Compagnie statuât sur leur cas (35). Pendant quatre ans, la Martinique vécut dans le calme; mais, en 1646, cette existence fut fortement troublée par l'imprudence du gouverneur. La Compagnie avait nommé lieutenant-général des îles, en 1644, le fils d'un ancien serviteur qui lui avait donné des gages de fidélité sous Richelieu, Nöel de Patrocles, chevalier et seigneur de Thoisy. Celui-ci, bien reçu à la Martinique et à la Guadeloupe, ne put se faire reconnaître à Saint-Christophe où Poincy, furieux (32) Doc. pub. par J. GUET : p. 88. (33) Du TERTRE : t. 1, p. 469. (34) Ibid., t. 2, pp. 26-27. (35) Arch. Nat. Col. F3-247. Commission au fait de la justice pour le sieur Leumont, du 2 mars 1644, f° 203.


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