Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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APPENDICE

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reraient mieux que des mémoires toujours trop diffus et où les faits contradictoires sont rarement bien exposés. La situation de la Nouvelle-Angleterre avec sa métropole m'a paru d'ailleurs une circonstance heureuse pour écarter de nos colonies cette nation rivale, en provoquant les efforts du commerce national et en rétablissant la confiance entre les ports et le royaume et les colonies. Mon espérance n'a point été trompée, les sentiments jusqu'alors si opposés se sont accusés sur les points les plus essentiels. Les représentants des colonies ont reconnu la sagesse des principes prohibitifs et la nécessité de les suivre rigoureusement pour tout ce que la métropole peut fournir et exporter. De leur côté, les députés des ports sont convenus qu'ils ont laissé les îles du Vent dans une espèce d'abandon. Ils ont promis en même temps que le commerce national ferait cesser, par ses efforts, le besoin des secours des étrangers. Ils ont également reconnu que l'entrepôt de Sainte-Lucie ne pouvait être supprimé dans le moment présent, qu'il fallait même y permettre l'introduction de la morue étrangère, attendu que l'impuissance actuelle du commerce national pour en approvisionner les îles du Vent, en prenant cependant des précautions pour diminuer en faveur de la pêche française les désavantages de la concurrence. Enfin le vœu unanime s'est porté à borner par toutes les voies possibles les communications étrangères aux seuls objets permis, sauf à les rompre entièrement après l'espace de dix-huit mois s'il est alors prouvé que le fait que notre commerce peut suffire à tous les besoins des îles quant aux approvisionnements et aux débouchés. « Le roi a qui j'ai rendu compte du résultat de ces conférences en a été très satisfait, et Sa Majesté a cru devoir exciter les efforts du commerce par des encouragements et lui faciliter les moyens de soutenir la concurrence des étrangers dans la fourniture de la morue et pour l'exportation des sirops et tafias. Elle a adopté la proposition faite en 1773 par la chambre d'agriculture de la Martinique, et renouvelée dans les conférences par les députés des colonies. Elle a en conséquence permis l'introduction de la morue étrangère dans l'entrepôt de Sainte-Lucie en l'assujettissant à un droit de 5 livres par quintal, pour être converti en une prime de pareille somme pour chaque quintal de morue de pêche nationale apporté par les bâtiments français aux îles du Vent. « Sa Majesté a également assujetti chaque velte de sirop et tafia exportée par les étrangers à un droit de trois sols, qui sera converti en une prime de pareille somme pour chaque velte de la même denrée chargé par les navires français. La conversion des sirops de sucre en eau-de-vie pouvant par la diminution du volume en faciliter le transport par les bâtiments français, Sa Majesté a bien voulu engager les habitants de nos îles à multiplier leurs guildiveries, et elle leur a accordé à cet effet l'exemption de la capitation pour les esclaves employés à ces établissements. « Sa Majesté a pensé au surplus que les facilités et les encouragements qu'elle accordait au commerce national deviendraient inutiles, et qu'elle ne parviendrait jamais à connaître parfaitement ce que peut ce même commerce pour le débouché et l'approvisionnement de nos îles, sans sa plus grande vigilance de la part des administrateurs à en écarter les bâtiments des autres nations. Sa Majesté vous défend en conséquence très expressément d'admettre aucun navire étranger dans d'autres ports que celui de l'entrepôt : elle vous ordonne en même temps de faire cesser les abus résultant par des ventes simulées, et de


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