Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

Il se révèle le continuateur de la politique coloniale de Richelieu. Renseigné sur le passé, il juge la flotte française insuffisante, réveille dans la métropole les vocations maritimes en s'occupant de l'organisation des jeunes recrues, en créant même des écoles d'hydrographie. Puis, disposant de la force navale, prête à intervenir le cas échéant, il réorganise profondément l'administration des colonies. Il commence par rattacher celles-ci à la couronne de France, par rétablir l'ordre en imposant la séparation des pouvoirs : le législatif et l'exécutif ne se confondront plus dans les attributions des mêmes fonctionnaires à la Martinique. Un intendant y est envoyé pour s'occuper uniquement de la justice civile, tandis que les officiers d'épée, restant à la tête de leurs troupes, ont seulement pour devoir, sur la réquisition des magistrats, de prêter main forte à l'exécution des jugements. Grâce à ces mesures de sagesse, les établissements français se développent ; sous l'impulsion du ministre, l'industrie coloniale se crée ; cependant que le gouvernement central, jugeant le marché des îles précieux, adopte une politique égoïste au regard des autres peuples. Il y impose un régime douanier prohibitif et sévit contre les liaisons étrangères persistantes. Pour lui, le principe fondamental est que les colonies ne doivent commercer qu'avec leur métropole. Avec des colonies de cultures, Colbert voudra des colonies de peuplement. Des lois rigoureuses qui s'imposent à une population turbulente, aux mœurs variées et libres, le ministre conseille de tempérer la rigueur ; il veut que l'on considère les colons « comme des peuples qui n'ont point encore senti l'autorité légitime, et par conséquent qu'il faut les accoutumer avec douceur, d'autant plus que la principale fin doit être de les maintenir et d'augmenter les colonies, en y attirant des peuples, ce qui ne peut se faire que par toutes sortes de bons traitements, excusant et dissimulant bien souvent leurs fautes, en ne punissant que les grandes et celles dont la suite et l'exemple pourraient causer la ruine des colonies » (2). Liberté et justice, intérêts, mariages, enfants des coloniaux, sont les principales occupations de ce ministre. Ses ordonnances sur les différents sujets de l'activité antillaise finissent par constituer les principales lois organiques des îles. Par. les mesures protectrices prises par Colbert, la vie devient facile au colon qui ne fait désormais dans la métropole que des voyages d'agrément ou d'affaires. Dès lors, si celui-ci adresse certaines plaintes, elles sont provoquées plutôt par les conséquences des guerres nombreuses de Louis XIV que par l'incurie de l'administration; (2) Arch. Nat. Col. F3-247, f° 579.


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