Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

causes concouraient à encourager le commerce clandestin: impossibilité pratique de surveiller des côtes aussi étendues, proximité des possessions espagnoles, anglaises, hollandaises, connivence des fonctionnaires aussi bien dans les colonies que dans la métropole, négligence du commerce français, sans oublier le grand mobile de toute fraude, l'intérêt conjugué des armateurs étrangers et des colons, enfin les guerres maritimes qui avaient désolé trop souvent toutes les possessions d'outre-mer et en particulier la Martinique. Pour vaincre définitivement toute fraude, le gouvernement, par les lettres-patentes de 1727, aggrava les sanctions antérieures. Les vaisseaux étrangers, soit de guerre ou marchands, ne pourraient, en cas de force majeure (tempête, voie d'eau, etc...), mouiller ailleurs que dans les ports où Sa Majesté tenait garnison, c'est-à-dire à Saint-Pierre, Fort-Royal et Trinité, sous peine de confiscation des vaisseaux et marchandises. Dans ces ports, les bâtiments étrangers en détresse ne seraient point inquiétés, s'ils pouvaient justifier que leur chargement en entier ou en partie n'était pas destiné aux négociants de l'île hospitalière. La navigation étrangère était interdite à une lieue des côtes des îles françaises habitées ou non. Les nègres, effets, denrées et marchandises (25) apportés par des navires français soupçonnés de faire le trafic interlope, seraient confisqués, ainsi que les bateaux qui les auraient amenés. 1000 livres d'amende, 3 ans de galères, seraient infligés aux capitaines de ces navires. Les habitants, recéleurs de marchandises étrangères, étaient aussi visés : « Ceux chez qui il se trouvera des nègres, effets, denrées et marchandises provenant ou des navires français ou des navires étrangers, seront condamnés à 1500 livres et à 3 ans de galères. » La prescription pour toute action judiciaire entamée contre des délinquants même en fuite, ne serait acquise qu'après cinq ans : la preuve par témoin restait admise durant ce temps. Enfin, les étrangers domiciliés aux îles ne pourraient participer au commerce du pays, si ce n'est pour écouler les produits de leurs terres (26). Ainsi la volonté du législateur était d'enrayer radiappartenant à l'Angleterre, où étant arrivés, ils renversent leur chargement dans des petites barques qu'ils appellent Sloops qui ne tirent ou ne calent que quatre à cinq pieds d'eau, afin de pouvoir entrer dans plusieurs petits ports écartés dans l'isle de la Martinique. Ils y vendent leurs dites marchandises d'Irlande en troc de sucre, de cacao, et qu'ils apportent en Angleterre où ils en tirent de grands profits. (Arch. Affaires étrangères. Mémoires et documents, fonds France et fonds divers supplément, t. 1991, France, f° 19.) (25) Le bœuf salé d'Irlande restait non prohibé. Mais les bateaux français, qui devaient seuls s'en charger, étaient tenus de prendre leur cargaison dans un port du royaume. (26) Lettres-patentes en forme d'édit d'octobre 1727. (Pub. par PETIT DE VIÉVIGNE : t. 1, pp. 117-127.) D'autre part, ces lettres-patentes, de 1727, n'exceptèrent même pas les Espagnols dans les défenses portées contre l'étranger. En effet, l'article 2


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