Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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LE RÉGIME

COMMERCIAL A

LA

MARTINIQUE

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transportaient celles de la Martinique même (21). A elle seule, cette ville accaparait les trois quarts du commerce de l'île. Puis venaient le Fort-Royal, la Trinité (22).

II Pendant douze années (1703-1715), la métropole, informée de la persistance de la contrebande, chercha à rendre plus rigoureuses les lois de la prohibition. Elle commença par punir les hauts coupables, ses représentants dans la colonie. L'intendant Vaucresson, accusé par les négociants de France de se livrer au commerce interlope ou de le favoriser, fut révoqué, et, en désignant provisoirement à son poste le commissaire de marine Mesnier, le gouvernement le menaça « de pareille et plus forte peine si sa conduite allait donner à de semblables plaintes » (23). Mais si les instructions devinrent de plus en plus rigoureuses, elles furent annihilées par la révolte martiniquaise et l'expulsion de La Varenne et Ricouart en 1717. Aussi la régence crut-elle nécessaire de définir les droits du commerce de France, en écartant les étrangers « de toute ingérence dans nos transactions coloniales ». Non seulement il était défendu d'admettre aucun bâtiment battant pavillon étranger dans les ports, havres, rivières, etc..., de la colonie; mais, encore, on ne pouvait transporter ailleurs que dans un port français les marchandises des îles. La confiscation du vaisseau, 1000 livres d'amende, un an de prison, l'incapacité de naviguer étaient les mesures coercitives prévues. Les armateurs français étaient obligés de déclarer au greffe des amirautés, au moment de l'enregistrement de leurs navires, qu'aucun étranger n'était intéressé directement ou indirectement avec eux dans les navires dont ils se rendaient acquéreurs (1717). Si précises que fussent ces dispositions, les liaisons avec l'étranger persistèrent. L'enquête de Desruaux (1719-1722) démontra, de façon manifeste, la manière dont elles se faisaient (transbordements en pleine mer, sur les côtes, etc..) (24). Trop de (21) Arch. Affaires étrangères. Mémoires et documents, fonds divers Amérique, t. 25, pp. 23-24. (22) E. DAUBIGNY : Choiseul et la France d'Outre-Mer après le traité de Paris, p. 3. (23) Arch. Nat. Col. F3-251. Lettre du Conseil de Marine au sieur Mesnier du 29 octobre 1715, f° 527. (24) Voici un rapport anonyme, qu'on peut dater entre 1700 et 1740, qui montre le procédé de fraude des étrangers : « Plusieurs navires anglais se trouvent en Espagne et d'autres en Portugal, qui chargent du sel destiné pour Irlande, où étant arrivés, ils achètent du bœuf, lard et beurre, etc., qu'ils font saler, et puis ayant chargé les denrées de mesme que d'autres qu'ils ont propres pour la Martinique, ils s'en vont à l'isle de la Barbade


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