Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

royale du 9 juin 1670 (7) vint mettre fin à la taxation. Colbert déclara libre le commerce entre Français. Dorénavant, il se ferait à prix débattus uniquement entre les parties contractantes. En conséquence, le 10 juillet 1677, Sa Majesté cassa les arrêts du Conseil Souverain des 3 août et 4 septembre 1676, qui, contrairement aux dispositions de l'ordonnance, fixaient le prix de la livre de roucou à cinquante livres de sucre et celui de l'indigo à trente livres (8). Jusqu'à cette date, le commerce interlope primait. La Compagnie des Indes Occidentales, formée en 1664, pour ramener en France tout le trafic des îles, ne fut pas plus heureuse que ses devancières. L'article 15 de sa constitution était formel dans le sens exclusif. Il était dit « que cette compagnie ferait seule, à l'exclusion des autres Français, le commerce de la navigation dans ces isles, pendant quarante années, avec défenses aux sujets du roy d'y négocier, à peine de confiscation de leurs vaisseaux et marchandises » (9). Les instructions particulières données aux administrateurs dans les îles n'étaient pas moins impératives. Le 13 juin 1669, Sa Majesté écrivit à Baas : « Entre toutes les choses que vous avez ordre de faire, il n'y en a point à quoi je désire que vous donniez plus d'application qu'à chasser tous les vaisseaux étrangers et empescher par toutes voies qu'ils ne fassent aucun commerce dans les isles, sans souffrir aucune exception pour quelque cause ou pour quelque prétexte que ce puisse être; c'est à quoi, je veux que vous teniez la main avec toute l'exactitude et la sévérité que mérite l'exécution d'un ordre si nécessaire et si important au bien de mes sujets (10). » Et tandis que tout était mis en œuvre pour faciliter son essor, la Compagnie des Indes Occidentales, insuffisamment organisée pour exploiter son vaste domaine colonial, et en particulier la Martinique (11), fut pourtant la première à ouvrir une brèche dans le système prohibitif, en accordant à certains vaisseaux (7) Arch. Nat. Col. B-2. Ordonnance du 9 juin 1670, f° 177. (8) Arch. Nat. Col. C8B-19. Commerce, 1664-1686. (9) Extrait de l'édit de 1664, portant rétablissement de la Compagnie des Indes Occidentales, publié par Petit. (Droit public ou gouvernement des colonies françaises, t. 1, p. 28.) (10) Arch. Nat. Col. F3-247, f° 559. (11) Un état statistique des vaisseaux de la Compagnie des Indes Occidentales, dressé en 1667, porte à 38 le nombre de ses vaisseaux, dont 10 armés en guerre. (Arch. Nat. Col. C8B-17, reg. non paginé.) D'après un autre document, en novembre 1667, il ne lui restait plus que 32 vaisseaux en service et 3 hors d'usage. (Arch. Nat. Col. F2A-15, reg. non paginé.) Enfin, pour son projet d'exploitation de la ligne des Antilles (1er octobre 1670 - 1er octobre 1671), la Compagnie prévoyait l'emploi de 15 vaisseaux de 150 tonneaux, évidemment chargés, disait-elle, « des choses les plus nécessaires à la vie ». (Arch. Nat. Col. C8B-17, reg. non paginé.)


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