Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

en outre les membres de l'assemblée à supprimer le droit sur les marchandises non sujettes au poids : « L'assemblée coloniale, proclamait-il, a bien le droit d'imposer ses propres denrées, mais cette faculté ne s'étend point sur les marchandises venant de la métropole : et l'assemblée a outrepassé ses pouvoirs en assujettissant au droit de 1 % à l'entrée des marchandises non sujettes au poids. Sa Majesté veut, en conséquence, que cette imposition nouvelle soit révoquée et même que celle de 1 % sur les marchandises sujettes au poids n'ait pas lieu (104). » C'était la victoire de la ville de Saint-Pierre qui représentait tout le négoce colonial, et était dégrevée des nouvelles charges fiscales. Dans le litige qui mettait cette ville aux prises avec les ruraux, sa voix avait trouvé écho dans tous les ports de commerce de France, et, malgré les démarches de Dubuc-Dufferet et les protestations de l'assemblée, la thèse des commerçants triompha. Dès lors, la représentation coloniale n'eut qu'une ressource : ce fut d'échanger une correspondance régulière avec son député. Instruite par lui des événements politique de la France, et n'ignorant rien des bonnes dispositions de Louis XVI pour son peuple, elle affirma hardiment ses prétentions, avoir sa place aux Etats Généraux qui allaient s'ouvrir (105). Deux lettres au roi et au ministre furent remises aux administrateurs dans ce but. Dans la seconde, elle demandait qu'à cause de l'éloignement et pour permettre aux délégués de siéger à Paris, DubucDufferet convoquât tous les propriétaires martiniquais, alors dans la capitale, afin d'élire trois députés aux Etats Généraux. Elle envoya même à Dubuc la liste de ces propriétaires en lui recommandant de la compléter au besoin, et des pouvoirs suffisants pour faire procéder à cette élection de députés (106). L'assemblée coloniale, créée dans un esprit large, avait malheureusement, dans l'étude et l'application des problèmes fiscaux, rencontré une vive opposition. Elle était maintenant l'objet de critiques et de haines d'une partie de la population. Les fondements de sa doctrine sapés, elle craignait que désormais ses revendications ne fussent pas écoutées. Elle conservait le vif ressentiment de son échec, et éprouvait le besoin de le réparer. Alors, elle se décida à ne jamais abandonner son programme, à guetter toutes les occasions pour le faire triompher. Avec elle, (104) Arch. Nat. Col. F3-265. Extrait de la lettre à Damas et Foulquier du 19 mars 1789, f° 480. (105) Voir le procès-verbal de la séance des électeurs de la Martinique, séante à Paris, chez Dubuc-Dufferet, député de cette colonie, le 11 juillet 1789. (Arch. Nat. Col. F3-29, fos 3 et suiv.) (106) Voir le procès-verbal de la séance des électeurs de la Martinique, séante à Paris, chez Dubuc-Dufferet, député de cette colonie, le 11 juillet 1789. (Arch. Nat. Col. F3-29, fos 3 et suiv.)


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