Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

et peu instruits des affaires coloniales, consultèrent leurs prédécesseurs qui étaient encore dans la colonie sur» les moyens propres à répartir la nouvelle quotité. Il fut décidé que les esclaves attachés aux sucreries seraient taxés à 18 livres; ceux des cultivateurs de café, de cacao, coton, manioc, à 14; ceux des villes et bourgs domestiques, ouvriers et tous ceux qui n'appartenaient pas à la culture, à 25 livres. La taxe sur les loyers fut de 5 % ; le droit de sortie sur le café fut porté de 1 à 6 deniers par livre. Les autres denrées continuèrent à ne payer qu'un droit de 1 %. L'impôt sur l'industrie, qui embrassait les fonctions d'armateurs, géreurs de cargaison, négociants, marchands détaillants, artisans, notaires, procureurs, huissiers, médecins, chirurgiens, apothicaires, droguistes, distillateurs, se paya au moyen d'une taxe de 4 % sur les loyers des maisons occupées par ces contribuables (67). On parvint de cette manière à atteindre le chiffre fixé. La nouvelle charge fiscale, jugée écrasante pour le colon, détermina le Conseil Supérieur, en invoquant l'état économique du pays, à solliciter du roi sa modération. D'après lui, la Martinique était encore décimée par les fléaux annuels (cylones, incendies, empoisonnements, etc.), la terre devenait de jour en jour plus stérile et ne produisait que lorsqu'on l'avait rudement bêchée, les habitants verraient bientôt la ruine consommée de leurs établissements. Nozières et Tascher, conscients de la misère générale, sollicitaient de leur côté avec instance, depuis plusieurs années, une réduction de 200.000 livres sur l'impôt général. Ils informaient le roi de la mesure généreuse qu'ils avaient dû prendre pour alléger les charges des colons. Ils venaient en effet, de fixer à 10 livres la taxe de 14 livres par tête de nègre qui frappait le café, le cacao, le manioc, car la première de ces cultures devenait improductive (68). Mais Sartines se borna à répondre « que l'état des finances et les nouveaux sacrifices que Sa Majesté vient de faire pour mieux assurer la garde de ses colonies, l'ont obligé de suspendre l'effet de sa bienveillance jusqu'à des époques plus heureuses » (69). Nullement satisfaits, Nozières et Tascher revinrent à la charge le 6 mars 1776 : « Si, écrivaient-ils, les circonstances actuelles ne nous ont point permis de réduire à un million la demande de l'impôt de la présente année, nous avons dû penser néanmoins (67) Arch. sition sur la (68) Arch. l'imposition (69) Arch.

Nat. Col. F3-261. Ordonnance additionnelle concernant l'impoMartinique pour l'année 1772, f° 209. Nat. Col. F3-261. Ordonnance du gouvernement concernant pour l'année 1775, f° 571. Nat. Col. F3-261. Lettre de Sartines (1775), f° 673.


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