Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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per de la réorganisation militaire, complétant par des mesures de détail celles prises auparavant. Par exemple, l'uniforme des régiments de la Martinique fut distinct de celui des autres possessions coloniales (des parements de drap ventre de biche, même au collet) : les officiers et les soldats de la compagnie des canonniers et bombardiers purent après avoir contracté un engagement de huit ans, porter leurs services jusqu'à vingt-quatre ans ; ils obtenaient une haute-paye de quatre sols par jour, et l'insigne de la vétérance propre à l'infanterie française (20). En 1777, François-Claude Amour, marquis de Bouillé, maréchal de camp, devint gouverneur. Né en Auvergne le 19 novembre 1739, il appartenait à l'armée dès l'âge de quatorze ans et avait fait de brillantes campagnes militaires. Il connaissait les îles du Vent déjà, ayant servi en 1768 à la Guadeloupe. Le 13 mai, il visita Saint-Pierre et fut accueilli avec tous les honneurs dus à son rang. Les instructions détaillées qu'il reçut avant son départ de France paraissent avoir été extraites en grande partie de celles de 1765 attribuées à Dubuc. Après une description de l'île, elles traitent de la religion, de la justice, des finances, du commerce, de la culture, de la population, des moyens de sûreté intérieure et extérieure (21). Bouillé n'eut guère de temps de les appliquer. En effet, dès 1775, les colonies anglaises de l'Amérique Septentrionale s'étaient soulevées contre les prétentions de leur métropole. Lafayette, qui combattait aux côtés des Insurgents, avait adressé au gouverneur de la Martinique un plan d'attaque sous pavillon américain, contre les autres colonies anglaises. Bouillé en avait informé la cour et attendait sa réponse, lorsque la guerre éclata entre la France et l'Angleterre. Le belliqueux marquis ordonna aux milices de se tenir sous les armes, prêtes à voler partout où le service du roi pourrait les appeler (22). Il avait en effet l'intention de ne pas se borner à la défensive, mais d'attaquer les colonies anglaises. Il leva une compagnie de cadets de famille de cent hommes dans les paroisses de Saint-Pierre, Fort-Royal, Gros-Morne. Decours de Thomazeau, lieutenant-colonel en retraite, fut placé à la tête des milices avec le titre de colonel-général. Huit compagnies de flibustiers, chacune de cent huit hommes, furent remises sur (20) Doc. pub. par DANEY-SIDNEY : t. 4, pp. 67 et suiv. Nozières fut remplacé par d'Argout, maréchal des camps et armées du roi, en 1776, et celui-ci, par Rouillé, l'année suivante. (21) Elles concernaient aussi le président Tascher, qui avait quitté hâtivement la colonie. Eu de Mondenoix le remplaça. (22) On fêta, à Saint-Pierre, l'entrée en guerre de la France. Le consul américain Bringham assista à toutes les cérémonies en l'honneur de l'alliance franco-américaine.


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