Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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observations sur la structure des îles anglaises, afin qu'en cas de guerre l'on connût leurs moyens offensifs et par suite le mal qu'en retour l'on pourrait leur faire. Il fallait que « ces mémoires prévissent tout et n'omissent rien » (4). Le morne Garnier, au cours des deux dernières attaques, avait révélé son importance. Le duc de Choiseul envoya des instructions au directeur du génie, par lesquelles celui-ci était chargé d'y élever des fortifications, sous le nom de Fort-Bourbon (5). Toute cette activité, due à Choiseul, montre le grand attachement de la France pour la Martinique : base principale de son influence au Nouveau-Monde. Restait la question des effectifs. Le ministre comprit que les détachements envoyés de la métropole ne seraient pas suffisants et qu'il fallait faire appel de nouveau à la milice. Mieux informé, en 1764, Choiseul avait jugé et apprécié le concours qu'avait apporté dans la défense du pays le corps des habitants qui, parfois mieux que les troupes réglées, avait, par son tir juste, par ses savantes escarmouches, mis en déroute un ennemi toujours plus nombreux. Si, en 1762, malgré l'inégalité des forces opposées, il n'avait pu vaincre jusqu'au bout, c'est que, rompant avec le passé, on lui avait demandé de livrer bataille rangée, lutte pour laquelle il n'était point apte. La durée des hostilités, les privations et les souffrances avaient peu à peu démolarisé des hommes qui ne voyaient jamais poindre à l'horizon, par suite des lourdeurs de l'Administration métropolitaine, le secours tant attendu de la France. Fénelon annonça donc aux habitants la confiance que leur courage inspirait encore à Sa Majesté, par la décision qu'elle venait de prendre pour les associer de nouveau à la défense de la colonie. Elle voulait, disait-il, que des compagnies de cinquante hommes se formassent au plus tôt, sous la dénomination de troupes nationales ; qu'elles eussent à leur tête les anciens offi-

(4) Voir DANEY-SIDNEY : t. 3, pp. 345 et suiv. (5) Le roi avait pourvu la colonie de deux ingénieurs pour les ouvrages d'art. (Arch. Ministère de la Guerre. Registre 3628. Ordonnance du roi, concernant la Martinique, du 24 mars 1763, n° 49.) D'autre part, ces instructions suivaient de très près l'arrivée à la Martinique de l'ingénieur Loupia. En effet, par lettre de Marly, 9 mai 1763, Choiseul l'avait informé de sa nomination aux îles du Vent : « Le roi, disait-il, ayant jugé à propos, Monsieur, de faire lever une carte topographique et géométrique des isles de la Martinique, Sainte-Lucie et MarieGalante, et Sa Majesté vous ordonnant d'y passer pour en déterminer géométriquement les points capitaux et les détails topographiques de MarieGalante, je vous adresse ci-joint les ordres et instructions nécessaires pour vous acquitter de cette commission... En conséquence, il convient que vous vous rendiez, le 15 juin, à Rochefort, pour vous y embarquer. (Arch. Ministère de la Guerre. Registre n° 3393, f° 11.)


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