Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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RÉGIME

MONARCHIQUE

À

LA

MARTINIQUE

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Levassor de Latouche rejeta la proposition des habitants. Un

vaisseau, deux frégates anglais, assiégèrent le Macouba, la BassePointe et la Grand'Anse, menaçant de faire sauter la ville si les

habitants ne se rendaient immédiatement. Ceux-ci firent leur soumission. A la Trinité, à la Tartane, à Sainte-Marie, au Marigot, sommés pareillement, les colons signèrent une promesse ainsi conçue : « Attendu que le fort Saint-Louis et les batteries de la côte ont été évacués ce matin par Messieurs les Officiers du roi, nous jurons et promettons à M. Herwey, commandant en ce quartier pour Sa Majesté Britannique, de nous conformer, adhérer et accéder à la capitulation générale qui sera faite par noire général, avec Leurs Excellences Messieurs les Généraux de terre et de mer de Sa Majesté Britannique. » C'est alors que, pour éviter aux femmes et enfants les horreurs de la guerre, une députation composée des sieurs Maria, Claudel, R. P. Laplane, dominicain, fut chargée de se rendre auprès du chef de la colonie. Détaillant la situation de l'île par un exposé net, faisant appel aux sentiments d'humanité qui l'animaient, les délégués purent le convaincre de l'inutilité de continuer la résistance. Ne se voyait-il pas, en effet, délaissé chaque jour ? (36). Levassor de Latouche écoula avec sérénité cette députation, sans lui donner la marque de son approbation. Trois jours se passèrent dans l'attente. Sollicité de toutes parts d'épargner la ville de Saint-Pierre, il se détermina enfin à envoyer de Bouran, major général des grenadiers royaux, et de Latouche, son frère, offrir au commandant anglais la reddition générale. Elle fut signée le 13, et le 15 février, Rodney et Monkton lurent les maîtres de la Martinique (37). Ainsi tomba entre des mains étrangères la colonie qui avait eu le bonheur de repousser les assauts répétés de ces mêmes Anglais. Sa perte aurait pu être évitée, si Levassor de Latouche avait consenti à mettre à profit l'offre des habitants qui consistait à faire la guerre par escarmouches, seule capable d'enflammer le pas témoin de la perte de cette isle, croyez-vous que son cœur voulût avouer le sacrifice que vous feriez avec nous, :lu peuple qu'il vous a également confié ? Vous seul pouvez, vous seul avez des droits de juger si l'utilité en serait raisonnable. C'est avec la plus parfaite résignation que nous attendons là-dessus votre décision. » Ont signé : Laguarigue de Survilliers, Dubuc, Baudoin, Martineau, Thierry, Belfonds. (Arch. Nat. Col. F3-28, fos 294 et suiv.) (86) Arch. Nat. Col. F3-28. Mémoires que prennent la liberté de présenter à M. le Général, les habitants et négociants du département de Saint-Pierre, sur l'état présent de la colonie, f"" 290-291. (37) Arch. Nat. Col. F8-28. Voir la lettre de capitulation rédigée par Levassor de Latouche (12 février 1762). Arch. Nat. Col. F3-42. Récits des événements qui ont eu lieu aux Antilles, de 17.">7 à 1763, par un capitaine aide-major de milices du Marin (Martinique), fos 204-20«.


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