Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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qui lui étaient destinés. Ainsi pensa-t-il pouvoir enlever la colonie affamée sans coup férir. En octobre 1745, parut en effet, devant Saint-Pierre, une division anglaise composée de 14 voiles. Elle croisa dans les parages de la Martinique jusqu'au 2 novembre, essaya d'aborder un bateau français échoué au Prêcheur, à l'anse Girard. Les milices accoururent sur les lieux menacés et, secondées par le feu de deux pièces de six montées sur la pointe dominant l'anse, ouvrirent une fusillade telle, qu'elles mirent les vaisseaux assaillants dans une situation critique. Ils allaient être faits prisonniers sans le secours efficace de quarante chaloupes qui vinrent les remorquer. Cette action, qui dura quatre heures, avait causé la perte de 70 à 80 hommes aux Anglais. Les colons eurent deux tués. Repoussée dans sa première tentative contre la Martinique, la flotte britannique se mit à croiser devant elle, du Prêcheur au Carbet. Le blocus durait, lorsque, le 11 novembre, un secours en vivres venant de France fut signalé. C'était une flotte commandée par le comte Dugué et le chevalier d'Aubigny, et qui escortait un important convoi de navires marchands destinés aux îles de la Martinique et de Saint-Domingue. Les Anglais voyant venir les deux frégates et craignant qu'il n'y en eût d'autres, cherchèrent à se mettre en ligne pour engager le combat. Le comte Dugué profita de leur erreur pour donner au convoi le temps de se mettre à couvert, puis hardiment engagea le feu. Après avoir lutté pendant longtemps contre des forces supérieures, les frégates vinrent se mettre à l'abri, le comte Dugué sous le fort et le chevalier d'Aubigny à l'Ilet à Ramier, où il arriva avec son mât de hune coupé. Sur 41 vaisseaux destinés à la Martinique, 10 entrèrent dans la baie du Fort-Royal, 6 atteignirent l'Ilet-à-Ramier, 3 l'Anse-Noire et 1 la Case-Navire ; 6 furent brûlés sur le rivage, depuis ce point jusqu'au fonds Giraumont, et 15 pris par l'ennemi. Deux jours après, la flotte britannique leva le blocus (4). Pendant les années suivantes, la tranquillité ne fut pas troublée. Aussi le commissaire de marine Ranché, devenu intendant (2 janvier 1747), s'occupa-t-il activement de réprimer le commerce interlope que les nécessités des colons rendaient fructueux. Il ne réussit guère et l'activité déployée par les flibustiers pour ravitailler la colonie, qui ne pouvait compter sur les arrivages métropolitains trop espacés, resta vive. A la fin de l'année 1747, une soixantaine de voiles parvint dans les ports, principalement à Saint-Pierre, à Fort-Royal, à la Trinité, au Robert, au Galion, au Marin, au Vauclin (5), et ce fut une vraie joie pour les Martiniquais accablés de privations. (4) Doc. pub. par (5) Doc. pub. par

DANEY-SIDNEY DANEY-SIDNEY

: t. 3, pp. 184 et suiv. : t. 3, pp. 191-192.


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