Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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pour changer les mœurs des habitants qu'ils jugent libres, pour empêcher le trafic étranger, pour faire appliquer les règlements publiés par eux. Trois mois après leur installation, ils s'étaient attirés la haine de la magistrature, des colons, des milices, des gens de mer, enfin de tous les corps constitués de l'île, en se montrant hautains et dédaigneux envers les uns, sévères et injustes envers les autres. La saisie, l'amende, la prison, frappèrent les armateurs, les négociants soupçonnés de faire le commerce interlope. Appliquant à la lettre les ordonnances royales, ils déployèrent une activité peu commune pour se montrer à la hauteur de leur tâche. Les représentants du roi annoncèrent, le 3 mai 1717, leur résolution de faire dans toute la colonie un voyage d'études. Il s'agissait de « démêler les sentiments des gens du pays, grands et petits, riches et pauvres, et, par cet examen, nous mettre en état de rendre un compte très régulier des remarques que nous aurions pu faire » (11). Ils envoyèrent donc, dans tous les bourgs qu'ils pensaient visiter, le colonel Collart, avec la mission de les renseigner sur l'état des esprits (12). L'envoyé, en toute bonne foi, leur rapporta que l'ordre régnait partout, que les habitants n'élevaient que de faibles plaintes motivées par la rareté des vivres; mais qu'il avait pu les apaiser, en leur annonçant le départ de Nantes de plusieurs navires chargés de marchandises pour la Martinique. Confiants, La Varenne et Ricouart quittèrent en canot le Fort-Royal, le jeudi 13 mai 1717, avec un secrétaire et trois domestiques. Ils devaient rencontrer en chemin les officiers et fonctionnaires dont le concours leur serait utile. Cependant, à leur insu, et dès le 24 avril, un vaste complot était ourdi contre eux, coupables aux yeux de certains Martiniquais d'avoir fait saisir dans la rade du Fort-Royal le navire espagnol le Saint-François-Xavier. Ce bateau sortait de la Vera Cruz, avait pour commissionnaire à la Martinique, Latouche Longpré, qui ne cessait de réclamer aux administrateurs la restitution de 5000 piastres sur une somme de 25.000 piastres trouvée dans ses coffres (13). fait planter des cannes à sucre nécessaires et fait les autres dépenses, c'est les ruiner entièrement que de les empêcher d'établir leurs sucreries. Le Conseil en a rendu compte à M. le Régent, et Son Altesse Royale a bien voulu leur permettre l'établissement des sucreries qui sont commencées. Ainsi vous n'y apporterez aucun obstacle et vous aurez soin de leur faire part de la permission qui leur est accordée. » (Arch. Nat. Col. F3-251, f3 735.) (11) Extrait des lettres de MM. La Varenne et Ricouart au Conseil de Marine, lors de leur arrivée en France. (Pub. par DESSALLES, t. 1, pp. 439 et suiv.) (12) Arch. Nat. Col. C8A-22. Lettre anonyme (21 juillet 1717) sur l'affaire La Varenne et Ricouart. (13) Arch. Nat. Col. C8B-4. Lettre de La Varenne au Conseil de Marine, du 28 avril 1717.


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