Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

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fasse sauter avec des mines les travaux et fortifications, maisons, magasins et tous autres bâtiments sans exception; qu'il brûle les cannes à sucre et autres plantes en campagne, qu'il fasse généralement tous les dégâts praticables dans une terre que l'on veut dévaster (50). » Sa campagne navale prit fin par suite de la notification aux îles, notamment à la Martinique, le 21 avril 1713, du traité de paix d'Utrecht. Cassard, conformément aux instructions royales, avait pillé ou rançonné Montserrat, Surinam, Berbice, SaintEustache, Curaçao, etc., puis était revenu à la Martinique. Le ministre Pontchartrain, tout en informant Phélypeaux des préliminaires de la paix, lui disait d'attendre un nouvel avis pour fêter la victoire des armes françaises. La nouvelle définitive, reçue au mois d'août, fut immédiatement rendue publique dans toute la colonie le 24 et célébrée le 25. La solennité qui se déroula fut des plus brillantes. Elle se termina tout à l'honneur de Phélypeaux qui l'avait organisée. Tous les corps militaires et civils de la colonie vinrent le féliciter, après le Te Deum chanté à l'église du Fort-Royal. Il y eut salves d'artillerie, réjouissances publiques et, sur la place d'armes de la ville, le clou de la soirée fut le feu d'artifice (51). Pendant ce spectacle, « les vaisseaux rangés dans le Carénage, au bout de cette place, au nombre de près de quarante, se trouvèrent en un instant illuminés dans tous leurs mâts et toutes leurs manœuvres, ce qui fit pendant deux heures de nuit le plus beau coup d'œil qu'on puisse imaginer » (52). Le gouverneur général Phélypeaux ne survécut pas longtemps à la fête. Il mourut le 21 octobre 1713. L'intérim du généralat fut assuré par La Malmaison, gouverneur de la Guadeloupe (53). (50) Doc. pub. par J. GUET : pp. 300 et suiv. (51) Cette attraction présentée sur quatre faces laissait voir des sujets différents et des inscriptions bien appropriées pour la circonstance : 1° deux mains passées en foi, soutenant sept couronnes ; 2° un lion et un coq se tenant chacun par une patte élevée; 3° une corne d'abondance d'où les richesses et les fruits ruisselaient sur la terre ; 4° la Justice recevant une balance des mains de la Paix. Les devises dans le même ordre, écrites en latin, étaient : a) Quo major numerus, concordia fortior (Plus on est nombreux, plus on est fort quand on est uni) ; b) Quis disjunguet ? (Qui nous désunira?); c) Abundantia ubique parta (L'abondance est partout répandue) ; d) Pacis Justicia soror et cornes (La Justice est sœur et compagne de la Paix). Toute cette machine était surmontée d'une grande figure représentant la sûreté publique qui foulait aux pieds la discorde et les armes. (Doc. cité par DESSALLES : t. 1, pp. 369 et suiv.) (52) Ibid. (53) J. GUET : pp. 301-302.


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