Histoire politique, économique et sociale de la Martinique sous l'Ancien Régime

Page 110

102

HISTOIRE POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE DE LA MARTINIQUE

portant des troupes réglées et des milices, appareilla pour la Guadeloupe. Après avoir repris Saint-Christophe, elle retourna dans la colonie où elle trouva la deuxième escadre qui, commandée par Iberville, était arrivée le 7 mars. Ensemble elles allèrent attaquer Nièves, qui capitula sans opposer de résistance (47). Pendant cinq ans, la Martinique vécut dans la tranquillité, mais le personnel dirigeant se renouvela. A l'intendant Robert succéda Vaucresson, en 1706; au gouverneur général Machault, Phélypeaux, qui arriva dans la colonie le 22 décembre 1710 (48). Installé au Fort-Royal le 2 janvier 1711, Phélypeaux ne put s'entendre avec l'intérimaire Gabaret, le suspendit même de ses fonctions de gouverneur particulier. De cette mesure de disgrâce, Gabaret conçut un vif chagrin qui l'emporta vers le milieu de l'année 1711, avant même de recevoir du roi une commission pour le gouvernement général de Saint-Domingue (49). Les Antilles, après ce temps de relâche où seuls ne comptent que les exploits des flibustiers, devinrent à nouveau le théâtre de la guerre. Louis XIV ne supportait qu'avec résignation la guerre de la succession d'Espagne. Il lui fallait porter au loin un coup décisif à l'empire colonial des nations rivales, qui avaient concentré tous leurs efforts sur le continent européen pour le vaincre. Les mers lui paraissaient libres. Les Français pouvaient attaquer les Portugais sur la route du Nouveau-Monde, aux îles du CapVert ; les Anglais, dans la mer des Caraïbes, à Montserrat, Antigue, Nièves, Saint-Christophe; les Hollandais à Saint-Eustache, Curaçao, sur la Terre Ferme, à Surinam, Berbice, etc. Pour cela, il fallait avoir recours aux armateurs, car la trésorerie de l'Etat était loin d'être prospère; il fallait trouver un excellent marin, intrépide et surtout capable d'agir vite. Ce fut Cassard. Celui-ci quitta Toulon le 29 mars 1712, arriva aux îles du Cap-Vert qu'il fit piller, passa à Surinam sans pouvoir y aborder par suite de l'état de la mer, débarqua à la Martinique le 1er juillet 1712. D'accord avec Phélypeaux, il entreprit sa croisière antillaise secondé par les troupes martiniquaises. Ses instructions du 12 février étaient rigoureuses et pour lui seul. « L'intention du roy est qu'il exerce, par représailles, tous les actes d'hostilités possibles sur les colonies ennemies, qu'il en (47) Gazette de France, année 1706, pp. 637-638. (48) Après le départ de l'intendant Robert, un sieur Mithon reçut une commission pour le remplacer ; mais, étranger à la justice, il n'eut jamais l'occasion de siéger au Conseil. Cependant le roi nomma, à l'intendance générale des îles, Croisset, qui démissionna de ses fonctions avant même d'être venu à la Martinique. (Voir DESSALLES : t. 1, pp. 345 et suiv.) (49) Arch. Nat. Col. F3-250. Lettre de Phélypeaux, du 27 avril 1711, f° 951. Arch. Nat. Col. F3-251. Lettre du ministre, du 4 avril 1712, fos 37-41.


Issuu converts static files into: digital portfolios, online yearbooks, online catalogs, digital photo albums and more. Sign up and create your flipbook.