Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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L'ILE D E

SAINT-DOMINGUE.

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Le port de Saint-Domingue peut con lenir des flottes considérables qui n'y craignent que le vent du sud. C'est le seul port de toute l'île où les Espagnols puissent négocier. Il y en a beaucoup d'autres, mais ils n'en sont pas les maîtres, et ils n'oseraient y entrer, à cause des aventuriers. Cette ville fournit les places, que les Espagnols ont dans cette île, des choses nécessaires à la vie et de toutes sortes de marchandises, et les habitants des autres villes y apportent les leurs afin de les vendre sur le lieu, ou de les embarquer pour l'Espagne ou ailleurs. A vingt lieues de Saint-Domingue, vers l'orient de l'île, il y a une petite ville champêtre nommée Santo-Yago-Cavallero, qui n'est point fortifiée. Ses habitants, excepté quelques marchands, sont tous chasseurs. Leur commerce consiste en cuirs de bœuf et en suif qu'ils portent vendre à Saint-Domingue. On voit quantité de bétail dans les prairies qui sont autour de cette ville. Vers son midi, au bord de la mer, on trouve un gros bourg n o m m é Le Cotui, où les habitants ne font autre chose que de planter du tabac et du cacao, dont on fait le chocolat. Ces habitants naviguent de là à une petite île déserte n o m m é e Sarna, qui n'en est éloignée que de cinq à six lieues. Le terrain en est sablonneux, et ne produit point d'autres bois que du gayac. Il n'y a point d'eau, et on est obligé de creuser des puits pour en avoir. Les Espagnols l'avaient autrefois peuplée de bêles à cornes, mais les aventuriers, y étant venus, les ont entièrement détruites, en sorte que cette nation n'y vient plus qu'en passant pour y pêcher. D u côté du ponant de Saint-Domingue, au midi de l'île, s'ouvre la baie d'Ocoa, qui peut contenir un grand nombre de vaisseaux. Sur cette baie est situé le bourg d'Asso. Ceux qui y demeurent ne font trafic que de cuirs et de tabac. On y voit plusieurs haltos,

c'est-à-dire, en espa-

gnol, des maisons de campagne où se retirent les chasseurs et où on nourrit quantité de bêtes privées. Ces hattos appartiennent à des seigneurs qui y laissent leurs esclaves pour les garder. Près du bourg d'Asso, il y en a un autre n o m m é Saint-Jean-de-Goave, lequel est bâti au bord d'une grande prairie que les Espagnols n o m m e n t la SavanaGrande de Santo-Juan, et les Français, le Grand-Fonds. Ces deux nations se sont souvent escarmouchées dans cette prairie, c o m m e j e le dirai au


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