Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS,

pays. Le gouvernement en avait été donné au sieur de Galifet, lieutenant du roi sur la côte de S a i n t - D o m i n g u e , et la garde devait être composée de dix compagnies d'infanterie, de 80 nègres et de 15 flibustiers armés, sur un navire pour la garde de la rade et celle de la côte. Dès ce m o m e n t , on prit le parti de tout abandonner. Dans ce dessein on fit sauter le 27, le fort de Saint-Lazare, et le 28, partie de celui de Boucachie ; car on n'acheva de le ruiner qu'après que toute l'armée fut sortie de la rade. Le même j o u r , elle vint mouiller devant ce fort ; les flibustiers

restèrent les derniers à terre ; et le sieur de Galifet les fit e m -

barquer suivant l'ordre qu'il reçut de M. de Pointis et de M. Ducasse, sans qu'ils eussent causé aucun désordre. Avant que de passer outre, on envoya de l'argent pour payer les flibustiers,

sur le

pied

des matelots. Mais M. Ducasse, malgré leurs

prétentions, refusa de le recevoir; car leur coutume est, à chaque prise de ville ou de vaisseau, de faire autant de parts du butin qu'ils sont d'hommes, et de tirer chacun la leur. Les flibustiers, voyant qu'on ne les satisfaisait pas, remirent à la voile et retournèrent à Carthagène, où ils refusèrent de recevoir le major de Saint-Domingue, et les ordres que M. Ducasse leur envoyait. Je ne doute point qu'ils n'y aient c o m m i s toute sorte de méfaits. On peut juger des cruautés qu'ils sont capables d'exercer, par celles qu'ils ont si souvent exercées. Accoutumés au sang, on les a vus en répandre dans les rencontres, plus par inclination que par nécessité, et suivant cet instinct barbare, traiter les h o m m e s c o m m e des animaux. Car enfin, pour peu qu'ils eussent eu d'humanité et de bon sens, n'auraient-ils pas fait réflexion que ceux de Carthagène ne devaient pas être responsables de leur mécontentement, et qu'ils ne pouvaient rien exiger d'eux, après une capitulation aussi authentique que celle que l'on venait de conclure ? Mais uniquement attachés

à leurs droits, ils ne se mettent guère en

peine de celui des gens. On pressa le départ à cause des maladies qui commençaient à nous attaquer plus cruellement que jamais, et à nous enlever beaucoup de m o n d e . Le premier j o u r de j u i n , après avoir entièrement ruiné le fort de Boucachie ; o n appareilla de Carthagène pour aller à la Grande

Rivière


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