Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS

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lieues plus bas, à un lieu n o m m é Cayonne, où ils mirent leurs gens à terre ; mais ils furent contraints d'abandonner leur entreprise avec perte de plus de deux cents h o m m e s , car les habitants qui s'étaient retirés dans le fort, firent sur eux une sortie vigoureuse, et les repoussèrent jusqu'à leurs vaisseaux. M. Le Vasseur, après cette victoire, reçut de

grands

applaudissements de tous les habitants: ils lui témoignèrent avec joie combien ils s'estimaient heureux de se voir sous la conduite

d'un

h o m m e qui les avait mis à couvert des insultes de leurs ennemis. Le bruit de cette action parvint jusqu'à M. de P o i n c y qui était à Saint-Christophe, il en fut réjoui ; néanmoins, c o m m e il craignait que quand M. Le Vasseur en serait venu au point qu'on ne pourrait lui nuire dans son île, il ne s'en rendît le maître absolu et qu'il n'exécutât pas le contrat passé entre eux,

il envoya deux de ses parents pour

l'observer, sous prétexte de se réjouir avec lui de sa victoire et de se ménager une habitation à la Tortue. M. Le Vasseur, qui était fin etsubtil, vit d'abord où cette démarche tendait. Il reçut fort bien ces deux m e s sieurs, leur fit mille amitiés, mais il les obligea adroitement de quitter l'île et de retourner à Saint-Christophe. Ce nouveau gouverneur, se voyant considéré de tout le m o n d e , crut que sa fortune était parfaitement établie, et que dorénavant il pourrait en profiter sans rien craindre. Il commença donc par maltraiter ces habitants, tirant plus de tribut d'eux qu'ils n'en pouvaient payer ; pour les y contraindre, il les faisait mettre en prison dans une machine de fer, où on les tourmentait si cruellement, qu'elle en tira le n o m d'enfer. Il alla même jusqu'à leur interdire l'exercice de la religion catholique, à brûler leurs

églises, et

chassa un prêtre qu'ils avaient pour les

instruire et pour leur administrer les sacrements. M. de P o i n c y , étant averti de toutes ces violences, tâcha de le tirer de là par de belles promesses, et il lui fit faire des propositions

avanta-

geuses, mais le gouverneur était trop habile pour ne pas voir où tendaient ces pièges ; il sut toujours les éviter, sans donner sujet à M. de P o i n c y de se plaindre de lui. Une fois cependant il s'en

moqua assez

ouvertement. Sur la prière que lui fit M. de Poincy de lui envoyer une grande Notre-Dame d'argent qui avait été prise dans un navire espagnol,


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