Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS,

son oncle avait fait tirer pour l'avertir, jugeant au bruit de la m o u s queterie qu'il entendait, que le lieu du combat n'était pas éloigné. En effet, son oncle ne voulait pas attendre davantage, étant pressé d'aller où le service du roi de France, son maître, l'appelait. Il fut ravi de voir son neveu de retour, victorieux, et sans blessures, et d'entendre les éloges q u ' o n faisait de sa valeur. Les boucaniers, qui ne pouvaient plus quitter Monbars, et qui n'ont point d'autre pays que celui où ils trouvent bonne chasse, s'embarquèrent avec lui. Les Indiens, prévoyant le danger qu'ils risquaient s'il leur fallait retourner dans leur pays après avoir abandonné les Espagnols, firent la même c h o s e ; de sorte que le vaisseau qu'on avait pris sur les Espagnols se trouva rempli de braves gens. On arma les Indiens de fusils et de sabres, dont ils se servaient aussi adroitement que de l'arc et des flèches. L'oncle donna le c o m m a n d e m e n t

du vaisseau à

son

neveu, et nomma pour lieutenant un officier habile, afin qu'il pût l'aider, en cas de besoin, de son conseil et de son e x p é r i e n c e ; après quoi, il fit mettre à la voile. Je n'ai point su quelle route il tint, mais je sais bien qu'après avoir vogué huit j o u r s , il fut attaqué, au sortir d'une grande baie, par quatre vaisseaux de guerre espagnols, qui coururent sur lui avant qu'il pût les éviter. Ils allaient, dit-on, au-devant de la grande flotte chargée de l'argent des Indiens. L'oncle de Monbars fut donc assailli par deux de ces grands navires. Il se défendit vaillamment, et fit reculer bien loin l'aborder. Ayant combattu

ceux qui

pensèrent

plus de trois heures, et ne voyant aucun

secours, parce que son neveu était extrêmement pressé par les deux autres, il se résolut à un dernier effort, et le fit avec tant de force que les deux navires espagnols allèrent à fond les premiers, et qu'il les suivit de près, avec la satisfaction d'avoir vu périr ses ennemis. Ainsi périt l'oncle de Monbars, grand h o m m e de mer et de guerre, après s'être défendu fort longtemps avec autant de bonheur que d'adresse; ses ennemis n'auraient pu triompher de lui, tout goutteux qu'il était, p o u r peu qu'il eût été secouru. Monbars, outré de la perte de son oncle et impatient de le venger,


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