Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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L'ILE DE LA TORTUE.

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petit bourg q u ' o n n o m m e la Basse-Terre où sont les magasins des habitants et des gargotiers qui demeurent devant le port. M. Blondel, ingénieur du roi, étant en 1667 aux Antilles, descendit à la Tortue, et traça un plan pour y construire un nouveau fort ; mais il paraît qu'on n'a pas bien exécuté son dessin, car on n'en a bâti que la tour qui ressemble mieux à un colombier qu'à la tour d'une forteresse. Il y a dans celte île six quartiers habités,

savoir : la

Basse-Terre,

Cayonne, la Montagne, le Ringot et la Pointe-au-Maçon. On pourrait encore en habiter un septième q u ' o n n o m m e le Capsterre, dont la terre est assez bonne, mais on n'y trouve point d'eau ; et en général il y en a peu dans l'île, excepté quelques sources où les habitants vont puiser ; ce qui les oblige à ramasser l'eau de la pluie. Ainsi le Père du Tertre paraît mal informé, lorsque décrivant l'île de la Tortue dans la première partie de son Histoire des Antilles, il dit que cette île est arrosée de quantité de rivières. Le terrain en est bon et fertile aux endroits où elle est habitée. Il s'y trouve quatre sortes de terres, et il y en a de rouge et de grise, dont on ferait d'aussi beaux vases que ceux qui nous viennent de Gênes. Toutes les montagnes y sont d'une espèce de roche aussi dure que le marbre, et cependant elles produisent des arbres aussi gros et aussi grands que nos plus belles forêts d'Europe. Leurs racines, qui sont toutes découvertes, se cramponnent dans les cavités que forme l'inégalité des rochers. Ils sont extrêmement secs de leur naturel, en sorte que lorsqu'ils sont coupés, ils se fendent au soleil en plusieurs éclats, et que ce bois n'est bon qu'à brûler. On trouve dans l'île de la Tortue tous les fruits qui nous viennent des Antilles; on y fait d'excellent tabac, qui surpasse en bonté celui de toutes les autres îles. Les cannes à sucre y viennent d'une grosseur extraordinaire et y sont plus sucrées qu'ailleurs, c'est-à-dire qu'elles sont moins aqueuses. Il y croît plusieurs arbres et plantes médicinaux. Il y a peu de chasse ; les seules bêtes à quatre pieds que l'on y voit sont des sangliers, q u ' o n y a apportés de la Grande-Ile, et qui y ont assez multiplié. Mais, par une ordonnance de M. d'Ogeron,

qui en était

gouverneur de m o n temps, il est défendu de chasser avec des chiens,


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