Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS.

Bradelet, leur commandant, ne trouvant plus rien à piller, résolut de partir. Il fit avertir les Espagnols de payer rançon pour leur bourg, sinon qu'il le brûlerait. Ils reçurent celte proposition froidement, la rejetèrent même avec m é p r i s ; mais lorsqu'ils le virent prêt à exécuter ses menaces, ils demandèrent à composer. Le capitaine Bradelet, qui n'était venu que pour avoir des vivres, leur prescrivit de donner une certaine quantité de maïs, qui, avec celui qu'il avait pris, pouvait suffire pour toute la flotte. Morgan était étonné que ces quatre vaisseaux tardaient si longtemps à revenir et ne savait que soupçonner. Tantôt il s'imaginait qu'ayant fait un grand butin, ils s'en seraient retournés à la Jamaïque, tantôt il craignait qu'ils n'eussent été battus, parce que le lieu où ils étaient allés pouvait facilement être secouru de Carthagène et de Sainte-Marthe. Enfin, ne sachant que j u g e r d'un si long retard, il balançait de prendre des mesures pour un nouveau dessein, dont il avait déjà fait quelques ouvertures à ses meilleurs a m i s ; il avait même fait assembler le conseil, lorsqu'on aperçut cinq vaisseaux et une barque. O n envoya à l'instant les reconnaître; mais c o m m e ils avaient le vent favorable, ils ne tardèrent pas à tirer Morgan d'inquiétude en arrivant auprès de lui. Le capitaine Bradelet lui rendit compte de son expédition; ensuite le maïs fut partagé à toute la flotte, selon la quantité de monde que chaque vaisseau contenait. Le pillage demeura à ceux qui avaient risqué leur vie pour avoir les vivres. Le navire q u ' o n avait pris vint fort à p r o p o s ; car un capitaine français, n o m m é le Gascon, avait perdu le sien, et on lui donna celui-ci du consentement de tout le m o n d e . Enfin, la flotte étant prête à faire voile, Morgan marqua le rendez-vous au Cap T i b r o n , afin q u e , si quelqu'un venait à être écarté par la tempête, il pût la rejoindre en ce lieu. Le cap Tibron est la pointe de l'occident de l'île de Saint-Domingue, lieu très c o m m o d e pour toutes sortes de vaisseaux qui y peuvent prendre du bois et de l'eau, choses absolument nécessaires et sans lesquelles on ne peut naviguer. Morgan se trouva le premier au rendez-vous et y attendit sa flotte qui y fut aussi en peu de j o u r s . Il y vint encore quelques vaisseaux de la Nouvelle-Angleterre, qui avaient armé à la Jamaïque dans le dessein de


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