Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS.

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Un esclave que ses gens avaient pris à la chasse lui ayant enfin donné avis que le président de Panama venait, il tint un conseil, où il fut arrêté de ne pas quitter Puerto-Bello, qu'on n'eût fait payer la rançon des forts et de la ville, qui pourrait monter à une somme aussi considérable que tout ce qu'ils avaient déjà. D e plus, afin qu'on ne fût point surpris, on résolut d'envoyer des h o m m e s bien armés au-devant du président et de l'attendre à un défilé où il ne pouvait passer plus de trois hommes de front. Ce projet fut exécuté ; le président vint, mais il n'avait pas tant de monde qu'on avait dit. Les aventuriers qui l'attendaient l'empêchèrent

d'avancer.

Il

ne

s'obstina pas beaucoup et différa jusqu'à ce qu'une partie de son monde qui était demeuré derrière, le joignît. Cependant il envoya un homme vers Morgan, avec ordre de lui dire que s'il ne sortait au plus tôt de la ville et des forts, il marcherait avec deux mille h o m m e s de renfort et qu'il ne lui donnerait point de quartier. Morgan

répondit qu'il ne sortirait

qu'à l'extrémité, et q u ' o n ne lui eût donné deux cent mille écus pour la rançon de la ville et des forts ; qu'autrement, il les démolirait à la barbe du président. Il députa donc de son côté deux bourgeois de Puerto-Bello pour traiter avec

lui de la rançon. Le président avait envoyé à Carthagène

demander une flotte, dans le dessein de venir par mer assiéger Morgan, pendant qu'il l'amuserait en faisant composer les bourgeois de PuertoBello avec lui, sans toutefois qu'ils s'exécutassent. Mais c o m m e ordinairement les Espagnols ne font pas grande diligence, et que Morgan le serrait de près, les bourgeois furent obligés

de lui représenter qu'il

valait mieux terminer promptement avec ces gens-là. Tout bien considéré, le président leur donna la liberté

de faire ce

qu'ils jugeraient à propos. Ils composèrent d o n c avec Morgan el accordèrent que dans quatre jours ils lui donneraient cent mille écus pour la rançon des forts, des prisonniers et de la ville. Ce qu'il accepta pourvu qu'ils ne manquassent point à leur parole. Le président de Panama, n o m m é D o m Juan Perez de Gusman, h o m m e de grand esprit et fort expérimenté dans les armes, était surpris d'entendre parler des exploits de ces gens-là, qui, sans autres armes que leurs fusils, avaient pris une


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