Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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PRISE DE LA VERA-CRUZ.

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vit s'avancer la hourque, il se prépara au c o m b a t ; mais il fut étrangement surpris de voir pavillon blanc et d'apprendre que le vaisseau qui accompagnait la hourque venait de Petit-Goave, et que Van H o r n qui le montait s'était rendu maître de cette prise. Laurent, irrité de ce c o u p , quitta Van Horn sans vouloir l'entendre; mais Van Horn, qui voulait, à quelque prix que ce fût, se venger de l ' o u trage que les Espagnols lui avaient fait, ne se mit guère en peine de son indignation. Il le suivit à Rotan, où il lui expliqua ses raisons, et lui fit si bien connaître que ses intentions étaient droites, que Laurent, persuadé de sa sincérité, entra avec lui dans le dessein de la Vera-Cruz. Dès ce moment, on le proposa au capitaine Grammont, à Junqué et à p l u sieurs autres. On tint conseil sur ce sujet, mais tous convinrent qu'il fallait beaucoup plus de monde que l'on n'en avait alors, et qu'il était absolument nécessaire d'amasser le plus de munitions qu'il serait p o s sible, afin de n'avoir besoin de rien sur la route, la nécessité donnant toujours lieu à des mouvements qui font découvrir et avorter les desseins les mieux concertés. Le capitaine Grammont, qui était du conseil, approuva cet a v i s : « Ce n'est pas là, dit-il, une de ces entreprises c o m m u n e s et journalières; je croirais celle-ci presque impossible sans l'expérience et la valeur de ceux qui m'écoutent; chacun de nous sait que les Espagnols ont toujours de bonnes troupes dans des places aussi considérables que la Vera-Cruz, et pour le commerce qui y est immense, et pour les marchands qui y sont tous fort riches. Cette ville, continua-t-il,

entretient au moins

trois

mille hommes de guerre pour sa défense, et dans vingt-quatre heures, elle peut en faire venir des environs quinze à seize mille, sans compter 800 hommes de garnison et soixante pièces de canon. Il n'y a pas là de quoi ruiner notre projet; mais celui-ci n'aura vraiment abouti q u e si sa réussite est assez prompte pour empêcher les

plus opulents de ces

Espagnols de mettre, c o m m e à l'accoutumée, leurs personnes et leurs richesses à l'abri dans les bois, où ils n'aient plus qu'à attendre tout à loisir notre rembarquement. P o u r réaliser notre dessein, il nous faut courage, diligence et secret. » C'est ce qui manque le moins aux flibustiers. Nous les avons constatés


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