Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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HISTOIRE DES AVENTURIERS.

savaient ce qu'ils étaient devenus, encore moins ce qu'ils devaient faire eux-mêmes. Alexandre se trouvait dans la m ê m e p e i n e ; mais, impatient de vaincre, il se détermina promptement et sortit, accompagné de ceux qui étaient alors auprès de lui, pour chercher les ennemis. C e u x - c i , l'ayant aperçu, jetèrent un cri, se relevèrent et coururent sur-le-champ à lui. Alexandre, les voyant venir avec tant d'impétuosité,

se mit à quartier avec les

siens et laissa passer le torrent; ensuite, il s'attacha à celui qui marchait à leur tête et lui porta un coup de sabre, qui coula sans aucun effet le long d'un grand bonnet, dont sa tête était couverte. Il allait redoubler, lorsqu'une racine d'arbre qui sortait de terre et qu'il rencontra malheureusement sous ses pieds, le fit tomber. A l'instant, il se releva, à demi soutenu sur une main, ne pouvant mieux faire, parce qu'il était étrangement pressé par son adversaire, et du revers de l'autre main (car il avait le poignet rude), il fit sauter le sabre de son ennemi, ce qui lui donna le loisir de se relever tout à fait et de c r i e r : « A

m o i , cama-

rades ! A m o i ! » , pour avertir ceux qui étaient encore dans le bois. Ses camarades sortant aussitôt, les uns d'un côté, les autres d'un autre, et prenant les ennemis, tantôt à dos, tantôt à flanc,

puis en queue, en

firent un grand c a r n a g e ; enfin, se réunissant tous à un signal que leur fit Alexandre, ils fondirent sur eux, le sabre à la main, et les trouvèrent tellement affaiblis, qu'ils tuèrent sans peine jusqu'au dernier, ayant pris à cœur de n'en pas laisser échapper un seul. D'un autre côté, ceux qui étaient demeurés dans le vaisseau, entendant le bruit de la mousqueterie, crurent que leurs gens avaient rencontré quelque embuscade ou quelque parti

d'Indiens; mais comme

la troupe de soldats qui avaient fait descente était brave et nombreuse, ils crurent qu'elle avait taillé en pièces ces Indiens, et que les autres se seraient sauvés dans leurs cavernes. C'est pourquoi ils se contentèrent de tirer le canon de leur bord pour les effrayer. Cependant, nos aventuriers ne perdirent point de temps. Ils dépouillèrent les morts, se vêtirent de leurs habits, et ayant le visage presque entièrement caché sous de grands bonnets qu'ils avaient ôtés à leurs ennemis, enfin poussant de grands cris pour marque de leur victoire,


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