Les aventuriers et les boucaniers d'Amérique

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VOYAGE AUX HONDURAS.

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et cependant de piller les villages et les petites villes qui étaient dans le golfe des Honduras, appartenant aux Espagnols. Chacun fut de cet avis; on quitta la rivière de Zague et on fit voile le long de la côte jusqu'à Puerto-Cavallo, où la flotte arriva en peu de j o u r s . Les flibustiers y trouvèrent un navire espagnol

de vingt-quatre pièces de canon et douze

barges qu'ils prirent, mais ils n'y trouvèrent que quelques marchandises qui devaient rester au bord de la mer, en vue d'échanges avec les Indiens de ce pays, les autres ayant été déchargées et enlevées dans les terres. Le Puerto-Cavallo est un lieu où les navires espagnols qui négocient dans les Honduras viennent ordinairement mouiller, et il y a des magasins dans lesquels on met les marchandises qui descendent de la p r o vince de Guatémala, c o m m e de la cochenille, de l'indigo, des cuirs, de la salsepareille, du jalap et du méchoacan. L'Olonnais descendit à terre sans trouver de résistance ni de marchandises dans les magasins. Il les brûla, prit quelques Espagnols à qui il fit donner la gêne pour savoir où était l'argent. S'ils ne lui enseignaient pas le chemin à son gré, s'ils ne lui indiquaient pas les endroits où les plus riches s'étaient réfugiés, il les fendait avec son sabre. Il fit souffrir à un mulâtre les plus cruels tourments qui se puissent imaginer, et ensuite il le fit jeter pieds et mains liés, tout en vie, dans la mer, afin de donner de la terreur à deux de ses camarades qui étaient présents et auxquels il jura d'en faire autant et même davantage s'ils ne lui montraient le chemin de Saint-Pierre, petite ville qu il

voulait prendre. Ces deux misérables,

voyant leur

camarade ainsi traité, dirent qu'ils l'y mèneraient. Il envoya quelquesuns de ses bâtiments croiser le long de la côte, et il emmena avec lui environ trois cents h o m m e s , à qui il dit résolument,

qu'en

quelque

occasion que ce fût, il marcherait à leur tête, mais que le premier qui reculerait, il le tuerait lui-même. L Olonnais se mit donc en chemin. Il n'avait pas encore fait trois lieues qu'il rencontra une embuscade d'Espagnols, retranchés derrière quelques gabions, dans un défilé qu'il était impossible d'éviter, à cause de l'épaisseur des bois et des halliers tout remplis d'épines. Cela ne 1 étonna pas : il tua premièrement ses deux guides et donna, lui et ses gens, sur les Espagnols avec tant d'impétuosité, qu'il les contraignit de


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