Mimi : moeurs guadeloupéennes

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MIMI

E t Julien, t r é b u c h a n t , se dirigea vers le lit de Mme Minglèche où il s'affaissa sans connaissance. Que se passa-t-il dans le c œ u r de cette excellente femme? Que demanda-t-elle au ciel en ce m o m e n t suprême? Voyait-elle le fils de son frère, a b sent depuis si longtemps, revenir dans son p a y s , pour le perdre aussitôt? Elle ne poussa pas u n cri, ne fit pas e n t e n d r e une plainte, mais s'élança vers J u l i e n , souleva sa t ê t e et lui fit respirer des sels qui se t r o u v a i e n t à sa portée. S'apercevant que ses soins é t a i e n t inefficaces, elle appela de t o u t e s ses forces Mimi et J e a n n i n e . La p o r t e de la c h a m b r e de Mimi s'ouvrit et la jeune fille affreusement pâle, p a r u t sur le seuil. — Q u ' y a-t-il, m a r r a i n e , dit-elle en a c c o u r a n t ? Mme Minglèche lui m o n t r a Julien qui n ' é t a i t pas encore revenu de son évanouissement. U n e légère écume n o i r â t r e frangeait sa b o u c h e ; il faisait ent e n d r e des râles sourds et prolongés. A cette v u e , Mimi poussa un cri de terreur. Port a n t la m a i n à son front, t a n d i s que de l ' a u t r e elle c o m p r i m a i t les b a t t e m e n t s de son sein, elle c h a n cela comme un h o m m e en proie à l'ivresse; mais son émotion fut de courte durée et elle reprit aussitôt son sang-froid habituel. — J e a n n i n e , dit-elle à la bonne qui «'tait accourue au cri jeté p a r sa maîtresse et qui, a p e r c e v a n t Julien étendu sur le lit, sans a u c u n signe de vie, avait mis les deux mains sur sa t ê t e , en j e t a n t des cris de désolation, J e a n n i n e , il ne faut pas vous désespérer ainsi. Courez vite d a n s la rue de l'Hôpital et amenez sur l'heure le médecin de la famille.


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