Journal de l'adjudant général Ramel

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terre de désolation, et je n'aurai plus à m'interrompre en reprenant le récit de notre délivrance. Le lieutenant Aimé étant tombé malade, fut transportés Cayenne et relevé par Mr. Freta, officier ferme, mais très

honnête il fit cesser les impertinences des negres, nous dispensa des roulements du tambour à la diane, lit de son mieux pour nous soulager. Tronçon Ducoudray étoit déjà très malade, il avoit besoin d'être servi; il demanda un negre; Jeannet lui envoya un nommé Louis très mauvais sujet, qu'il tira de la franchise. Nous savions bien qu'on ne mettroit auprès de nous que des hommes, dont on se seroit assure auparavant, mais celui-ci etoit d'une impertinence intolérable, il insultoit Ducoudray, et le tourmentoit, celui-ci se plaignit au commandant Fréta, qui lit arrêter le negre et le renvoya à Cayenne, Cette conduite irrita Jeannet, il rappella sur le champ Fréta, le fit de nouveau remplacer par Aimé, et ordonna que le negre seroit reconduit au fort : Louis revint donc plus insolent que jamais, et servit le malheureux Ducoudray malgré lui. Nous ne fûmes pas fachés que Mr. Fréta quittat le commandement du fort, il nous eut été très pénible de le compromettre par noire fuite. Voici comment le commandant Aimé signala son retour, J'ai déjà fait observer la liaison de l'abbé Brothier avec Billaud Varennes; la conduite de ce prêtre nous indignoit chaque jour d'avantage, il ne parloit que de vengeance, de sang, et de la nouvelle terreur, qui devoit selon lui operer la contrerévolution ; on lui faisoit donc quelques observalions sur ses cris de vengeance. Il repondit précisément comme le fameux docteur révolutionnaire : « Eh! que m'importe le nombre d'homme S pourvu que l'espece reste; » il inventoit d'horribles calomnies et vomissoit des injures contre tout le inonde. Nous lui témoignames vive-


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