Journal de l'adjudant général Ramel

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— 101 — merits : le ciel redevint serein, mais le vent souffloit avec furie. Nous étions couchés à plat ventre sur le sable, ne pouvant nous défendre de la piqure des insectes, et des morsures des crabes. Le Tellier avoit si bien ménagé la petite provision de rhum, qu'il en restoit encore une demie bouteille, nous n'avions pas la force d'avaler, nous nous raffraichissions seulement la bouche et les lèvres. Pendant celte journée du 9, le Tellier héroique ami de Barthélémy avoit arrangé un petit abri avec des branches d'abres, et pendant qu'il reposoit ou plutôt qu'il s'etteignoit, le Tellier oubliant ses propres souffrances, chassoit les insectes avec un léger rameau, et les écartoit du visage et des mains de son maître. Quel dévouement, quelle part glorieuse le Tellier prit à nos malheurs! Le soir le tems redevint obscur; nous eumes encore à travailler une partie de la nuit pendant la marée pour conserver la pirogue, n'ayant aucun autre moyen pour la fixer : comme les tigres nous approchoient beaucoup, nous ralumâmes notre feu et nous passames ainsi le reste de cette seconde nuit depuis noire naufrage, et la septième dépuis notre évasion. Le 10 juin au point du jour, nous appercumes au loin, un

vaisseau que Barrick

reconnut

pour

être corsaire

Anglois Nous étions blottis sous des arbres, où nous avions fait

une espece de cabane : j'en sortis à 6 heures du matin pour examiner le temps, et notre pirogue, j' avois à peine fait quelques pas en me traînant, que j'apperçois sur le rivage à environ deux cents

pas,

deux

hommes armés, qui

venoient vers nous, j'accours et crie « voilà des hommes, » tous nos malheureux se levent à la fois, Barrick, qui étoit


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