Voyage à Cayenne dans les deux Amériques et chez les anthropophages.Tome second

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( 73 ) des phantômes, un livre à la main , sans savoir où ils vont, ce qu'ils veulent, s'ils existent encore ; ils se touchent et ne s'apperçoivent pas. Telles on peint les ombres au bord du sombre manoir , se pressant avec effroi pour entendre ou subir leurs destinées. Un seul habitant nommé Henri Wiliam s'est rélégué dans ces contrées. Il les reçoit avec bonté, les console ; mais il n'a rien à leur donner que des paroles de paix. Il leur permet de tirer de l'eau à son puits, et c'est le plus grand bienfait pour eux. Prévost n'avoit pas six pieds à creuser pour trouver une source vive : il ne l'a pas voulu. Si la maladie , le désespoir, la peste, n'étoient pas déjà parmi eux, ils en creuseroient euxmêmes. Au bout de quelques jours, Jean Sourzac, né à Colonge, invite ses amis à diner avec lui, distribue de l'argent aux moins fortunés , va se baigner sur le premier saut, court de toutes ses forces, et se précipite dans le torrent. Le même jour, Brunégat, vicaire de Bazoches, s'enfonce dam le désert; on le fait chercher, il étoit étendu sans vie aux pieds d'une bache. Ces morts violentes font une si vive impression sur la majorité , que les uns tombent en démence , les autres sont agités


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