Voyage à Cayenne dans les deux Amériques et chez les anthropophages.Tome second

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( 248 ) rouge, et sa feuille est longue et d'un vert couleur d'oseille de crapaud, dont elle a la forme. Ma grage est une planche où sont incrustés de petits morceaux de roche en pointe; en France, on l'appelleroit une rape. Ainsi, je rape ou je grage le maniok, les enfans le grattent, et la mère bâtit à la hâte un fourneau d'argile pour nous servir de platine ( ou grand plateau de fonte sur lequel on met la racine après les préparatifs nécessaires ). Au bout de deux heures, j'attache deux couleuvres à une branche pour exprimer l'eau de ma racine. Le lecteur me demande ce que c'est qu'une couleuvre; jamais objet ne fut mieux désigné. On sait que la couleuvre se replie, se rétrécit ou s'alonge à volonté; ainsi mon pressoir ressemble à une peau de serpent. C'est un tissu de jonc flexible et peu serré. A la place de la tête est une anse qui m a servi à suspendre mon pressoir. Pour ne pas m épuiser en restant sur le balancier, j'attache deuxgrosses roches à ses deux bouts ; le poids du maniok fait alonger la couleuvre, ainsi l'eau s'échappe dans un sapyra ou plat du pays , y dépose une pâte d'un blanc de neige, qui est le poison


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